La vie en numéros

Combien de temps une personne passe-t-elle à l’école durant une vie ? Des chercheurs allemands ont mesuré le temps dévolu à nos diverses activités, échelonnées sur 78 ans (News.com : Sixteen hours of passion). Le temps consacré aux études s’élève à un maigre 22 mois, ou 2,4 %. Heureusement, l’acharnement du cerveau à apprendre comble le vide : le socioconstructivisme fait son oeuvre. Considérant que l’école n’est qu’une barque qu’on emprunte, le temps d’une traversée, la majorité des apprentissages sont donc appris à l’école de la vie.

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L'éducation de l'I-génération

L’accélération de l’évolution transforme les esprits les plus malléables, soit ceux des enfants. On ne compte plus les facteurs qui ont métamorphosé les jeunes et qui font en sorte que la relation avec les adultes s’est amenuisée. Parmi les plus évidents, notons l’éclatement de la famille, la décroissance du nombre d’enfants, les garderies, les médias et les technologies. Le corps n’y échappe pas non plus, comme nous le verrons plus loin. Tout cela fait en sorte que l’on s’intéresse énormément à l’I-génération, d’autant plus que la décroissance démographique rend ces enfants plus précieux que leurs grands-parents. Triste constatation.

Plusieurs articles, tant sociologiques qu’éducationnels, ont récemment attiré mon attention sur le phénomène des enfants maillés. En voici la liste, accompagnée de quelques extraits :

Being 13

13-year-olds are more mature physically than they were a generation ago. From 1963 to the early 1990s, the age at which a girl got her first period dropped by about one month every decade, to 12.1 years for black girls and 12.6 years for whites. [...] As for boys, [...] they are reaching their adult heights at younger ages, which suggests that they too are maturing earlier.

Us et coutumes de l’I-génération

Certains, comme la chercheuse américaine Christine Rosen dans un récent article de The New Atlantis, s’interrogent sur le sentiment de toute-puissance que les moyens modernes de communication donnent à l’I-génération. De l’exacerbation du moi qui en découle, un syndrome qu’elle nomme « egocasting ». Quelle part, se demande- t-elle, reste-t-il pour la découverte, la surprise ? – et le réel ? – lorsque l’individu, vissé à son écran, a le sentiment exaltant de tenir le monde au bout de sa souris-télécommande ?

Children of the Information Age: A Reversal of Roles

The computer and the Internet have revolutionized the balance between the power of the adults and the status of children. The loss of authority on the part of the adults on the one hand and the new power held by the computer-and-Internet children on the other, is ever changing the adult-child relationship in schools and at homes.

The Net Generation Goes to College

They want to learn, but they want to learn only what they have to learn, and they want to learn it in a style that is best for them. [...] Often they prefer to learn by doing.


La revue Edutopia consacre son numéro d’octobre aux enfants qui ont grandis avec Internet et les nouvelles technologies de la communication. Parmi les articles les plus intéressants :

Connecting to the 21st-Century Student

Teachers in every strata of education are increasingly dealing with a student population that is not only more wired than they are but also grew up in a techno-drenched atmosphere that has trained them to absorb and process information in fundamentally different ways. This generation of students is more likely to be armed with cell phones, laptops, and iPods than with spiral notebooks and #2 pencils.

Way Beyond Fuddy-Duddy: New Libraries Bring Out the Best in Students

Our philosophy was, libraries aren’t places to be quiet. [...] Our goal was to make the libraries look like the most fantastical things that ever landed. [...] We wanted to transform libraries into something kid friendly, very active, very inviting, that didn’t look like a fuddy-duddy library you would normally see in a school.

No More Books

Many classrooms and, in some cases, entire counties have supplied laptops to support curricula, and reports from such projects [...] have cited dramatic improvements in student engagement, reduced absenteeism, and fewer discipline problems.

Media Literacy Is Vital in the Age of the Image

Every infant is born with the aptitude for reading the body language, gestures, and facial expressions of the cooing mother, the whispering dad. Visual communication is as natural as opeing our eyes.


Mise à jour, 10 janvier 2010 | Sur ce même sujet, je suggère un excellent article du New York Times (The Children of Cyberspace: Old Fogies by Their 20s) dans lequel on fait mention de chercheurs qui commencent à s’intéresser au phénomène des mini-générations, c’est-à-dire ces groupes d’âge façonnés par les nouvelles technologies.


Par ricochet :
M-learning
Le fossé des générations
Éduquer la génération Internet
Étude sur la génération M
Les TIC… un jeu d’enfant
Les outils dernier cri pour les enfants du primaire

Faut-il adapter la pédagogie à la discipline ?

En lisant un article du New York Times (Bush Education Law Shows Mixed Results in First Test) sur la très controversée politique éducationnelle No Child Left Behind, j’ai été particulièrement fasciné par un graphique qui illustre la progression des taux de réussite en mathématique et en lecture. Alors que l’article est d’un intérêt mitigé un étranger, le graphique révèle un contraste frappant entre les mathématiques et la lecture : le premier affiche une progression constante, tant au primaire qu’au secondaire, tandis que le second stagne aux deux ordres d’enseignement.

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En apprentissage, l'émotion l'emporte sur la raison

L’enseignement s’est longtemps abêti au voisinage de la raison pure. En rabaissant les émotions à la frivolité, on affirmait la supériorité de l’esprit dans la gouverne des choses. Pas étonnant, considérant que l’éducation a été institutionnalisée par l’Église. L’intelligence était l’affaire des hommes ; les femmes pouvaient s’adonner aux sentiments. En fin de compte, l’enseignement a fini par se détacher de la réalité. Mais depuis son émancipation récente, nous comprenons mieux le rôle fondamental de l’affectivité dans l’apprentissage. Cela, d’ailleurs, a été l’une des plus importantes révélations de mes études postuniversitaires.

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Modèle d'apprentissage

Nous avons déjà souligné l’importance de la quête de sens dans l’apprentissage. Il n’est pas facile, toutefois, d’expliquer cette nuance aux élèves. Aujourd’hui, George Siemens nous rappelle son excellent modèle du processus d’apprentissage, dont la simplicité est à la portée des élèves. Le modèle en question ne comprend que quatre composantes : les données, l’information, les connaissances, et le sens.

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Une école libre qui réussit

Ah, un autre modèle inspirant. Deux fois dans la même semaine… il y a de quoi fêter ! Bon sang que j’aimerais enseigner dans cette école sans cloche ni prise de présence, et où le conseil étudiant prend les décisions (Washington Post : Principal’s Acid Test: ‘Hippie High’). De plus, cela ne l’empêche pas de réussir : au palmarès des meilleures écoles secondaires américaines du magazine Newsweek, H-B Woodlawn figure au cinquième rang national, et première de toute la région du nord-est. Oui… oui… je sais bien qu’il faut prendre avec un grain de sel ces palmarès ; mais comme celui-ci repose uniquement sur le taux de diplomation, c’est tout de même intéressant.

L'école du repas familial

La fête des Pères m’a rappelé les merveilleux moments qui réunissaient toute la famille autour de la table, jadis, à la fin de la journée. C’était un moment de grâce où on racontait les événements de la journée, entrecoupés d’histoires, d’espoirs et de rires. La télévision dans la salle à manger aurait été perçue, en ce temps-là, comme une absurdité. Quand mon père était plus vanné qu’à l’accoutumée, le tourne-disque du séjour jouait faiblement de l’opéra. On apprenait les bonnes manières, et davantage encore comme le démontre quelques études. …

Un billet de Fernette et Brock Eide résume les recherches sur le sujet, incluant quelques liens pour en savoir davantage, dont un article plus détaillé du Times Leader (Families that dine together reap benefits; article plus accessible en ligne mais résumé dans un bulletin d’école). Plutôt que de rapporter les conclusions des diverses études, j’ai jugé plus utile d’en faire une synthèse schématique (cliquer sur l’image pour l’agrandir) :

RepasFamilialT.jpg

Il faut reconnaître que notre mode de vie sape les traditions familiales. La vie s’avère plus effrénée, les repas plus précipités et les conversations plus superficielles, tandis que la culture rabaisse le rôle des parents. Mais surtout, l’enfant-roi trouve plus amusant de s’abandonner aux tentations de la télévision et des jeux vidéo. Le plus souvent, il convertit sa chambre en forteresse autarcique. Du coup, c’est une belle occasion quotidienne de socioconstructivisme perdu. Et de souvenirs inestimables.

Mise à jour (10 avril 2006) | Un article intéressant dans La Presse : Où sont passés les soupers en famille d’antan? [cet article n’est plus en ligne]. En complément, l’article propose Dix conseils pour réussir ses soupers en famille [cet article n’est plus en ligne], que je résume dans le schéma ci-dessous.


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Mise à jour, 23 juillet 2010 | Une étude publiée dans la revue Social Forces indique que les discussions familiales de l’actualité ont des effets positifs sur le raisonnement, les habiletés mathématiques et la performance scolaire (The State University of New York at Buffalo: Family Chats Can Help Students Learn, Especially in Richer Countries, Study Shows).


Par ricochet :
Le petit déjeuner et la réussite scolaire
Facteurs de réussite scolaire

Rôles d'un enseignant blogueur

Des collègues et moi avons introduit des blogues pour les élèves de 2e secondaire du P.E.I. de mon école. L’implantation a été plus longue qu’on ne l’avait escompté. Néanmoins, après un mois d’utilisation avec les élèves, je crois utile de faire un bilan de l’expérience du point de vue d’un enseignant et des rôles qu’il est appelé à jouer. Cela pourra toujours servir aux écoles qui désirent doter leurs élèves d’un formidable outil d’apprentissage. …

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Motivation, plaisir et gratification

Quand les choses ne tournent pas rond en classe, il est trop facile de jeter le blâme sur les élèves. Avant de condamner ces derniers, ou la négligence de leurs parents, l’enseignant doit d’abord se demander s’il n’est pas en partie responsable de ses déboires. En ce qui me concerne, je réalise que j’aurais pu faire mieux. Cela n’absout pas entièrement les élèves, qui ont eux aussi leurs responsabilités, mais c’est un exercice d’analyse professionnelle qui contribue à améliorer ma pratique. À ce sujet, la théorie de la motivation scolaire me sert régulièrement. …

L’auteur qui m’a le plus influencé au regard de la motivation scolaire est Rolland Viau. Je retiens surtout les variables qui influencent l’apprentissage scolaire (variables relatives à l’apprenant, la famille, l’enseignant, l’institution, et la société) et son modèle de la motivation scolaire (cliquer sur l’image ci-dessous pour l’agrandir) qui repose essentiellement sur trois déterminants perceptuels : la valeur de la tâche, la compétence individuelle, et le degré de contrôlabilité sur la tâche. Ces notions me guident tous les jours.

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Néanmoins, il m’a toujours semblé qu’un déterminant était absent du modèle de Viau. Ce qui m’a amené à remettre le modèle en question est le fait que je réussissais à motiver tous les élèves à participer à une activité sans égard à la valeur de la tâche ou à la contrôlabilité — par exemple quand je jouais à Simon Says (Jean dit) avec les élèves du primaire. Il m’est apparu, alors, que la perception de plaisir était un déterminant extrêmement puissant. Cette intuition est confirmée, depuis quelque temps, grâce à tout l’intérêt qui est porté au jeu en tant que moyen d’apprentissage. Par conséquent, je m’inspire maintenant de quatre facteurs pour motiver les élèves.

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La perception de plaisir, toutefois, n’est pas une condition nécessaire à la motivation, quoiqu’elle possède l’avantage de pouvoir se substituer aux autres. Peut-être est-ce parce qu’elle est émotionnelle, tandis que les trois autres sont plus rationnelles. En soi, le plaisir a une portée universelle qui répond à un penchant naturel et instinctif.

À ce propos, Kathy Sierra nous signale que la gratification est plus efficace quand elle est distribuée à petite dose. Je retiens surtout ce petit bijou : « Intermittent, unexpected treats are more powerful than regurlarly scheduled expected treats. » Allez… ce n’est pas si difficile : un sourire par-ci, un compliment par-là, une surprise de temps à autre, et, pourquoi pas, un jeu pour égayer l’atmosphère.

Tout ça me rappelle à quel point j’ai bûché à l’école quand elle était sous la gouverne des religieux. L’apprentissage y était une chose extrêmement sérieuse. À croire que tout plaisir était synonyme de péché. Tâchons au moins d’épargner cette grisaille aux jeunes d’aujourd’hui.

Mise à jour, 24 juillet 2010 | Une étude de l’Université d’Hertfordshire indique que l’habileté d’un professeur à divertir les étudiants constitue un facteur d’apprentissage et de motivation à la présence en classe (AlphaGalileo: Entertain to Educate!).

Mise à jour, 29 août 2010 | J’ajoute le modèle de la motivation d’Eccles et Wigfield (2002), traduit par Devos et Dumay (2006) que me fait généreusement découvrir M.F. Noel dans un commentaire. Ce modèle intègre la perception de l’environnement social, un élément qui lie la motivation au contexte, un aspect si important de l’apprentissage.

Mise à jour, 29 décembre 2010 | Dans un article paru dans la revue Correspondance (2000, 5-3), Roland Viau aborde la question de la motivation sous un angle plus pratique, identifiant dix conditions pour motiver les élèves (Correspondance : Des conditions à respecter pour susciter la motivation des élèves) :

  • Être signifiante, aux yeux de l’élève
    • Être diversifiée et s’intégrer aux autres activités
    • Représenter un défi pour l’élève
    • Être authentique
    • Exiger un engagement cognitif de l’élève
    • Responsabiliser l’élève en lui permettant de faire des choix
    • Permettre à l’élève d’interagir et de collaborer avec les autres
    • Avoir un caractère interdisciplinaire
    • Comporter des consignes claires
    • Se dérouler sur une période de temps suffisante

  • Par ricochet :
    Impact des jouets sur le cerveau
    Lecture et jeux vidéo

    Étude sur les causes de l'intimidation

    Une étude sur l’intimidation, publiée dans la revue Archives of Pediatrics & Adolescent Medicine, identifie quelques facteurs qui contribuent à l’intimidation chez les jeunes (ABC News : TV linked to bullying). Les facteurs en question sont l’environnement familial, la stimulation cognitive (incluant la lecture), le soutien affectif, ainsi que la télévision. (Merci à une de mes élèves, Marie-Audrey B., de m’avoir signalé la nouvelle.)

    Par ricochet :
    L’intimidation et les blogs
    Les ados, les blogs, et les bêtises

    Voir venir la pratique carnetière adolescente (Mario tout de go)