Comment les médias sociaux stimulent ma mémoire

petersenmemoryLa mémoire la plus profonde est une mémoire de toute notre destinée. (Jean Guitton)

La mémoire, malheureusement, ne se commande pas. Il faut reconnaître notre faible empire sur cette contrée de l’intelligence. Au mieux réussit-on à cultiver aléatoirement certains souvenirs. On ne passe pas son temps, après tout, à déterminer ce que nous retenons, sauf peut-être l’école dans son déterminisme. La nature ne nous accorde pas ce pouvoir de décision. Malgré quelques stratégies de mémorisation, la chimie neuronale demeure souveraine au regard des sujets.

En amont de la pensée, le cerveau réagit principalement à des stimuli. Force m’est de reconnaître que les nouvelles technologies de la communication ont considérablement transformé la qualité des stimuli que j’absorbe, tant par leur substance que leur nombre. Emportée par le flot, l’information devient plus précaire. Néanmoins, je reste fasciné par les moyens dont ces mêmes moyens de communication pallient l’hécatombe mnémonique, comme s’ils contenaient leur propre antidote.

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Les connaissances ne garantissent pas la pensée scientifique

markssciencemeasurement1La science ne sert guère qu’à nous donner une idée de l’étendue de notre ignorance. (Félicité de Lammenais)

Le Québec et les États-Unis, notamment, s’inquiètent du désintéressement des jeunes pour les sciences et la technologie. Une nouvelle étude devrait intéresser les réformistes, tout comme les tenants de la primauté des connaissances en éducation : des chercheurs concluent en effet que les connaissances scientifiques ne mènent pas nécessairement à une pensée scientifique (Ohio State University Research News : Study: Learning science facts doesn’t boost science reasoning).

Les chercheurs ont comparé les résultats de près de 6000 étudiants en science et ingénierie d’universités chinoises et américaines. Quoique les premiers réussissent beaucoup mieux que les seconds dans les tests de connaissances, ils s’équivalent sur le plan du raisonnement scientifique.

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Anki : la mémorisation par répétition espacée

RenselarMomoryLeaves.jpgCelui qui a une bonne mémoire a plus de facilités pour oublier beaucoup de choses. (Stanislaw Jerzy Lec)

La répétition espacée est une technique de mémorisation qui repose sur la courbe de l’oubli en augmentant l’intervalle entre les rappels de l’information à apprendre. Anki améliore l’usage des cartes mémoires par recours à ce principe. Le screencast d’introduction de cette application multiplateformes en illustre assez bien l’utilité. Sans pour autant préconiser la surconsommation de connaissances, il n’en demeure pas moins qu’il y a des occasions où leur mémorisation est nécessaire à la célérité, voire à l’exécution d’une tâche.

    AnkiForgettingCurve.jpg

Je jongle avec l’idée d’ajouter à mes cours une courte période de 5 minutes de répétition espacée des notions vues en classe. C’est, il me semble, une stratégie qui mérite expérimentation, soit à l’aide d’Anki ou d’un autre moyen.

Mise à jour, 08 août 2009 | Mettant à profit la recherche sur les effets de l’espacement et de l’évaluation, le site SpacedEd propose une série de cours et de formations qui ne prennent que trois minutes par jour. On peut aussi y créer ses propres cours.


(Image thématique : The Memory of Leaves, par Van Renselar)


Par ricochet :
Répertoire de cartes-mémoires
Techniques de mémorisation
6 qualités des connaissances mémorisées
Outils d’évaluation en ligne : objectif connaissances
La courbe de l’oubli
Améliorer la mémoire par le geste
Étude : la répétition à outrance n’aide pas la mémoire
Un élève sur dix a des problèmes de mémoire de travail

Un élève sur dix a des problèmes de mémoire de travail

VedderMemory.jpgQuand on n’a pas de mémoire, on se répète; quand on en a, on répète les autres.
(Albert Brie)

Après avoir examiné plus de trois mille enfants, des chercheurs de l’Université de Durham affirment que 10 % des élèves éprouvent des difficultés relativement à la mémoire de travail et, par conséquent, à l’apprentissage (EurekAlert! : Children’s under-achievement could be down to poor working memory; BBC : Memory issue ‘hits 10% of pupils’). Le problème affecte les écoliers de tout âge. Je peux attester, comme le soutiennent les chercheurs, que peu d’enseignants savent diagnostiquer un problème de mémoire de travail et que l’on a plutôt tendance à y voir un problème d’inattention ou d’inintelligence.

Les chercheurs ont conçu un test, le Working Memory Rating Scale (version logiciel), pour évaluer la capacité de la mémoire de travail (working memory; NCBI : Working memory). Évidemment, le conflit d’intérêts entre l’impartialité du chercheur et la nature commerciale du test saute aux yeux. Il faut espérer que la communauté scientifique passe ladite recherche au crible fin.


(Image thématique : Memory, par Elihu Vedder)


Par ricochet :
Le stress occulte la mémoire
Techniques de mémorisation
TIC, méthode, et mémoire de travail chez les élèves
6 qualités des connaissances mémorisées
Améliorer la mémoire par le geste
Étude : la répétition à outrance n’aide pas la mémoire
La mémoire de travail

Étude : la répétition à outrance n'aide pas la mémoire

DaliPersistenceMemory.jpgDieu ne se répète jamais, même dans un brin d’herbe.
(Taylor Caldwell)

Il y a une longue tradition en enseignement, difficile à déraciner, voulant que l’on apprenne les choses séquentiellement, une à la fois. Mieux encore, on favorise la répétition pour consolider les acquis. Toutefois, une étude publiée dans Current Directions in Psychological Science (Increasing Retention Without Increasing Study Time [PDF]) indique que la concentration des activités, du moins en ce qui concerne le par coeur, ne favorise en rien la mémoire à long terme (Eureka Alert! : Back to School: Cramming doesn’t work in the long term). Après un mois, il ne reste plus rien de l’effort additionnel.

Par contre, la réactivation des connaissances a un effet positif sur la mémorisation. Dans une autre expérience, les chercheurs ont constaté une hausse des résultats après l’espacement des sessions d’étude. D’un point de vue pédagogique, cela souligne l’importance d’activer les connaissances antérieures. L’expérience m’a appris que plus le délai est long, plus on gagne à faire l’exercice collectivement.

L’intégration périodique des savoirs dans le cadre de contextes signifiants contribue encore davantage à la mémorisation. Cela explique pourquoi j’ai retenu les opérations mathématiques usuelles, mais que j’ai occulté la trigonométrie. Du coup, j’enrage de tout ce temps perdu à me casser le ciboulot sur des connaissances inutiles, notamment six années de latin. Malheureusement, je vois encore des professeurs pour qui l’enseignement est une messe.

(Image thématique : La désintégration de la persistance de la mémoire, par Salvador Dali)


Par ricochet :
Le stress occulte la mémoire
Multitasking, mémoire et déficit d’attention
Techniques de mémorisation
TIC, méthode, et mémoire de travail chez les élèves
6 qualités des connaissances mémorisées
Améliorer la mémoire par le geste

La courbe de l'oubli

DaliPersistenceMemoire.jpgUn rêve sans étoiles est un rêve oublié. (Paul Éluard)

Ceux qui comptent sur la mémoire jouent avec le feu. Car le cerveau consume l’information avec une efficacité infernale. Par conséquent, les élèves n’ont pas seulement besoin de méthode pour optimiser la mémorisation, mais aussi de motivation. Tant mieux si on peut faire d’une pierre deux coups en utilisant la courbe type d’oubli pour les conscientiser à l’importance de la méthode (Smartkit : Learning Strategies: How one study tip can dramatically improve your memory).

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6 qualités des connaissances mémorisées

MondrianComposition10.jpgIl est si facile de perdre la mémoire de soi-même. (Henrik Ibsen)

Ah! si seulement on savait pourquoi les connaissances s’incrustent ou s’évaporent. Dans Made to Stick: Why Some Ideas Survive and Others Die, Chip Heath, de l’université Stanford, et son frère Dan tentent de répondre à cette question qui hante les éducateurs. Clive Shepherd résume le livre en présentant les six qualités qui font que les idées qui collent à la mémoire, ainsi que les implications pour l’enseignement. Dans l’esprit du premier point énuméré, j’ai réduit le tout à un mind map (cliquez sur l’image pour un agrandissement). Par un heureux hasard, l’acronyme des mots anglais (simplicity, unexpectedness, concreteness, credibility, emotionality, stories) forment SUCCÈS.


    HeathStickKnowledgeS.jpg


(Image thématique : Composition No. 10, par Piet Mondrian)


Par ricochet :
Multitasking, mémoire et déficit d’attention
Techniques de mémorisation
10 lois de la simplicité

Stratégies de métacognition

UnderlinedThoughtsWestcoat.jpgRéfléchir, c’est déranger ses pensées. (Jean Rostand)

Plusieurs psychopédagogues considèrent la métacognition comme l’un des quatre grands domaines des connaissances générales, les trois autres étant les connaissances factuelles, conceptuelles et procédurales (Pintrich, Paul; 2002; The role of metacognitive knowledge in learning, teaching, and assessing; Theory into Practice). L’efficacité et le rôle fondamental de la métacognition dans l’apprentissage ne font plus de doute. Cependant, sa récente émergence fait en sorte qu’elle est encore mal comprise par les enseignants. Plusieurs la perçoivent comme un concept théorique, flou de surcroît, et difficile à actualiser dans la classe.

Fernette et Brock Eide présentent une bonne synthèse des stratégies métacognitives dont les professeurs peuvent s’inspirer (Eide Neurolearning Blog : Strategic Learning: Metacognition and Metamemory). Compte tenu de leur importance, je les ai traduites et représentées dans une carte heuristique (cliquez sur l’image pour un agrandissement ; version pop-up pour petits écrans ; version PDF). Par la même occasion, j’ai ajouté des stratégies glanées à partir de sources diverses.

L’activité cérébrale associée à la métacognition est étonnante. Voici une image du cerveau pendant qu’il réfléchit au processus d’apprentissage et à aux erreurs commises ; les zones de couleurs chaudes (rouge et jaune) sont activées par des pensées positives, tandis que les couleurs froides (vert et bleu) reflètent des pensées négatives (source : The Journal of Neuroscience; Error Monitoring Using External Feedback ; PDF) :

      MetacognitionCerveau.jpg

(Image thématique : Pensées soulignées, par Natasha Wescoat)


Par ricochet :
Comportements pro-connaissances
77 conseils pour faciliter l’apprentissage
Le cycle de l’apprentissage
La philosophie accroît le Q.I. chez les enfants
Techniques de mémorisation

L’animateur RÉCIT: Un passeur vers la culture numérique? (Fabulations réelles dans un monde virtuel)

Une autre étude met en garde contre le multitasking

Une nouvelle étude dénonce les effets du multitasking sur les apprentissages, principalement au regard de la mémorisation (EurekAlert! : Multi-tasking adversely affects brain’s learning, UCLA psychologists report ; eSchool News : Study: Multitasking hinders learning). Le multitasking fait désormais partie de nos vies ; c’est en quelque sorte la rançon de l’évolution technologique. Les adultes n’y échappent pas davantage que les jeunes. Dans ces circonstances, les enseignants n’ont guère d’autre choix que de montrer aux élèves comment composer avec plusieurs tâches de façon efficace, mais surtout à quel moment il faut éviter le multitasking pour se concentrer sur une seule tâche.

Il sera intéressant, par ailleurs, de voir comment la plasticité cérébrale s’adaptera au multitasking chez les jeunes qui sont nés avec les nouvelles technologies de la communication.


Par ricochet :
Cerveau multifonctionnel
Multitasking, mémoire et déficit d’attention
La musique et le multitasking

Multitasking, mémoire et déficit d'attention

Selon Donna LaVoie, professeur de psychologie à l’Université de Saint-Louis, une surabondance de stimuli handicape la mémoire (California Virtual Campus : Info overload functions as roadblock to better memory). Après avoir dénoncé le multitasking, l’article décrit les trois types de mémoire, puis donne une série de conseils pour en améliorer la performance.

Mise à jour, 13 juin 2009 | Dans une série de deux articles plus complets, Hubert Guillaud dresse un excellent bilan de notre propension au multitâches :

Voir également le chapitre Attention du livre Brain Rules de John Medina.

Mise à jour, 02 août 2009 | Malgré que le cerveau fonctionne optimalement lorsqu’il se concentre sur une tâche, il possède cette capacité essentielle à composer simultanément, quoiqu’en alternance, avec plusieurs tâches. Dans certains cas, il en va de notre survie. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une compétence qui a contribué à notre essor.

Idéalement, nous devrions pouvoir nous concentrer sur une tâche à la fois. Mais la nature se moque de nos idéaux. La réalité nous oblige à composer avec une multitude d’événements, particulièrement dans l’accélération du progrès. Dans cette perspective, nous devons développer à la fois une capacité de concentration et des capacités de multitâches.

Mise à jour, 30 août 2009 | On a fait grand état, cette semaine, de cette étude révélant la pauvre performance des gens pourtant aguerris au multitâche à accomplir une tâche dans un contexte où justement ils doivent composer avec plusieurs tâches (Radio-Canada: Les travers de l’individu « multitâche »). Néanmoins, nous succombons gaiement. Stowe Boyd apporte une réponse rafraîchissante en soulignant que la productivité ne constitue qu’un élément du casse-tête et que nous devons élargir la gamme des mesures (/Message: The War On Flow, 2009: Why Studies About Multitasking Are Missing The Point).

Perhaps what we are doing has nothing to do with efficiency. I don’t operate the way I do with the principal goal of speeding things up. My motivations are much more complex and diffused.

I don’t perceive what I am doing as multitasking, really. I am not trying to speed up how quickly I shift from one thing to another. Instead, I am involved in a stream of activities, in which other people figure prominently, either synchronously through direct discussion (a la Twitter or IM) or indirectly, through their writings and my responses.


Par ricochet :
Le stress occulte la mémoire
Cerveau multifonctionnel
Une autre étude met en garde contre le multitasking