TIC : les réseaux sociaux peuvent-ils nuire aux filles?


NikolicTalkTalk.jpgLes paroles seules comptent. Le reste est bavardage. (Eugène Ionesco)

Les technologies des réseaux sociaux ont aussi leurs aspérités. En débordant dans le monde virtuel, les cercles d’amis sont en présence quasi constante. Les relations ne disposent plus de ce temps d’arrêt pour laisser la poussière retomber et mettre les choses en perspective. Le ton et le propos même sont avivés par le huis clos, loin de tout regard adulte. Ceux qui ont déjà vu un exemple de clavardage entre un groupe de jeunes savent de quoi il en retourne.

Les conversations entre amis dérapent elles aussi. Les filles, surtout, ont une culture de la conversation qui semble leur appartenir, ce que les Anglais appellent le “girl talk”. Or, il semble que cet emballement pour l’appartenance au groupe et la causette mène dans certains cas à l’anxiété et la dépression chez les filles. Les psychologues parlent de corumination pour décrire les échanges répétés sur un même problème (New York Times : Girl Talk Has Its Limits). Les garçons, semble-t-il, seraient moins vulnérables aux troubles associés au phénomène.

À la fin d’une rencontre avec les parents cette semaine, après que j’aie tenté de les convaincre de l’importance de doter leur enfant d’un portatif, un parent m’a rétorqué au passage « Pourquoi un portable? Tout ce qu’elle fait, c’est tchater! » À peine ai-je eu le temps de répondre « Vous croyez? » qu’il avait disparu. J’aurais aimé lui expliquer qu’un ordinateur s’apprend à l’usage et que l’éducation d’un adolescent nécessite aussi des parents discussion, supervision et arrangement, parfois même dans la négociation.

Un peu hors sujet, j’ai été heureux d’apprendre que le taux de suicide au Québec avait baissé à un niveau record, quoique toujours l’un des plus élevés dans le monde (Globe and Mail : ‘Suicide is not an option’). Il m’est alors venu cette hypothèse que les réseaux sociaux en ligne, en permettant à des jeunes souvent isolés ou rejetés de trouver une oreille sympathique au-delà de leur entourage, contribuent à cette baisse. Si l’hypothèse se confirmait, je pourrais répondre aux parents qui s’inquiètent du clavardage de leur enfant qu’un portatif pourrait aussi lui sauver la vie.


(Image thématique : Talk-Talk, par Jasna Nikolic)


Par ricochet :

Internet et les réseaux sociaux (Pew Internet)

La réalité virtuelle des jeunes

Les réseaux sociaux, les ados et les infos perso

L’éducation aux réseaux sociaux

Rapport : les enfants dans un monde numérique

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8 réponses

  • Si les personnes qui affirment catégoriquement et se sauvent littéralement avant de discuter (avec toi dans l’exemple) font de même avec leur enfant… je comprends que ces personnes pensent que leur enfant fait ceci et pas cela. Et tout ça sans savoir vraiment, finalement.

  • Marie-Eve Pitel dit :

    Les réseaux sociaux peuvent-ils nuire aux garçons?

    J’ai trouvé votre article très intéressant. Cependant, je me questionne vraiment à savoir si les garçons n’avaient pas ce même genre de problème avec les jeux sur Internet. Par exemple, mon frère et plusieurs de ses amis se sont inscrits à un jeu payant sur le Web du nom de World of Warcraft il y a plusieurs années. Ils faisaient tous partie de cette communauté et les histoires qui en ressortent ne sont pas très consolantes. Certains garçons, dont mon frère et 2 de ses amis, n’ont pas été capables de quitter le jeu puisqu’ils étaient accros à ce jeu. Ce faisant, leurs notes à l’école chutaient, il n’avait plus le temps de voir leurs amis et certains ont eu finalement extrêmement de la difficulté à arrêter de jouer. Faire évoluer son personnage, m’expliquaient-ils, devenait plus important que n’importe quoi. Ils avaient un manque dans leur vie lorsqu’ils ne jouaient pas. Alors, un parent aurait bien pu vous dire, « un portable, pour qu’elle raison, pour qu’il joue sans cesse aux jeux vidéos? ».

  • florence meichel dit :

    il y a quelques jours Erwan témoignait de cela a propos de Moodle sur apprendre 2.0 : il se référait en particulier à l’expérience de jeunes filles !

    « Erwan a aussi évoqué comment la mise à distance induite par l’outil pouvait faciliter la prise de confiance de certains élèves et leur intégration dans le groupe : il semblerait que la distance facilite la rapprochement d’une certaine manière ! En effet, certains élèves ont plus de facilités à gérer la pression du groupe dans leurs usages de Moodle : ils participent mieux au groupe par cette voie, et ce faisant ils prennent confiance en eux et développent des compétences sociales qu’ils sont ensuite capables de transférer dans d’autre contextes y compris en situation de cours classique ! »

  • « Il m’est alors venu cette hypothèse que les réseaux sociaux en ligne, en permettant à des jeunes souvent isolés ou rejetés de trouver une oreille sympathique au-delà de leur entourage, contribuent à cette baisse » Cela fait un certain temps que je me pose la question et j’en arrive à la même conclusion que vous. Sans avoir de données précises, juste de l’observation, j’y vois une cause à effet. J’aimerai bien que ce sujet soit approfondi dans l’avenir.

  • Saviez-vous qu’au Japon avoir un portatif (même un MacBook Air) était équivalent à avoir Windows NT ici : très démodé!

    So, on est au Canada et les portatifs sont surement ce qu’il y a de mieux pour l’apprentissage à travers les TICS.

    Moi qui aime travailler dans un endroit où je me sens bien, je me rends régulièrement à la bibliothèque avec mon Vaio.

    Moi qui est souvent à la dernière minute, j’apprécie beaucoup mon portable, qui me permet de travailler dans le bus et à l’école.

    Et pourtant : moi qui croit que le ch@t devrait venir après tout, qui n’aime pas Windows Live Messenger et qui ne fait partie de (presque) aucun réseau social, j’ai un portable et c’est super!

    ————-
    Super nouvelle pour le taux de suicide ;-)
    Juste à Québec, en décembre dernier, il y avait une moyenne de 4 suicides par jour!

  • Cynthia Desbiens dit :

    Lorsque j’étais en sixième année, j’avais une meilleure amie avec qui je partageais tout. Vous savez ce que c’est que d’avoir UN meilleur ami. Nous avions passé l’année ensemble et mes parents avaient décidé de déménager dans une autre ville durant l’été. J’ai donc dû quitter cette amie le cœur triste. Pendant les vacances de Noël qui suivirent, j’ai décidé d’aller passer une fin de semaine chez elle. Nous ne nous étions pas revues depuis des mois. Nous étions heureuses de se voir. Pendant la première heure de nos retrouvailles, nous avons joué à un jeu de société. Au moment de ramassé, elle s’est levée et s’est dirigée vers son ordinateur. J’ai ramassé seule et j’ai attendu. Devinez combien de temps elle y est restée? Trois longues heures… Je ne vous expliquerai pas comment je me sentais parce cela serait trop long, mais que s’était-il passé avec elle? Quelques semaines avant, elle n’avait pas d’ordinateur et là elle clavardait beaucoup trop longtemps à mon goût avec des gars! Tout ça pour dire que le temps précieux qu’on aurait pu passer ensemble, et bien, elle l’a passé avec son cher appareil.

    Combien de fois une amie m’a écrit sur MSN au sujet d’un souci qu’elle avait au lieu de me téléphoner pour en parler? Oui, les discussions se perdent. Oui, les grands cercles d’amis dont on ne connaît même pas les noms de famille se forment. Même moi, je trouve que je passe trop de temps sur le net. J’ai toutefois le mérite de ne pas passer mes soirées à clavarder et de ne pas avoir de « faux amis ».

    Malgré tout ceci, je crois, comme vous, que l’ordinateur est une ressource en or. Les parents devraient s’attarder davantage à l’ « éducation » d’Internet auprès de leurs enfants. Ainsi, les jeunes découvriraient qu’il y a tellement d’horizons derrière l’écran! Comme vous avez tenté de le faire à votre rencontre de parents, je pense qu’il est essentiel de sensibiliser ces derniers. Il est vrai qu’à l’école nous essayons de montrer aux élèves les autres facettes d’Internet avec nos sites éducatifs et autres, mais il n’y a rien de mieux que d’avoir des parents qui abordent dans le même sens.

  • Le commentaire de Cynthia me touche, et témoigne encore une fois que toute technologie nécessite éducation et apprentissage, comme les autres le soulignent également. Il semble que nous soyons unanimes sur ce point.

  • Marie-Eve B.Blais dit :

    Personnellement, l’utilisation des TIC à l’école est très intéressant sur plusieurs niveaux. Bien sûre, toute technologie peut ammener de petits problèmes comme ceux mentionnés ci-haut, mais personnellement, il y a beaucoup plus d’avantages que d’inconvénients. Le monde virtuel peut ammener beaucoup notamment aux personnes qui se se sentent seuls, tristes et qui ont besoin de parler, aux personnes qui veulent découvrir sur divers sujets, aux personnes qui veulent avoir des points de vue sur un sujet etc. Bref, l’utilisation d’un ordinateur est très intéressant au niveau culturel, académique et social. Tous ces éléments sont importants pour l’éducation de nos jeunes tant au point de vue personnelle que sociale. Je ne crois pas que les réseaux sociaux peuvent nuire aux filles seulement. Cependant, les parents doivent faire un accord avec leurs jeunes pour l’utilisation de ce média. Les parents peuvent établir un juste milieu avec leurs enfants pour l’utilisation de l’ordinateur, mais ils doivent comprendre l’importance de celle-ci. De plus, il y a plusieurs avantages à avoir un portable.



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