Un portable, pas un portail


FreconVerticlePurpleEnclosu.jpgLes plus beaux zoos n’ont pas de clôture. (Pierre Filion)

La Commission scolaire des Découvreurs a fait l’acquisition d’Édu-groupe, un portail conçu par la GRICS pour faciliter les communications au sein d’une école. Selon la GRICS, il s’agit d’un ensemble d’outils qui « favorise la collaboration de différentes personnes à la réalisation de projets communs. » Au terme d’une présentation qui ne se voulait qu’un survol du portail, mais très bien orchestrée néanmoins, j’ai posé une tapée de questions pour voir ce que le portail avait au ventre. Les réponses, décevantes, m’ont laissé une piètre impression de l’outil, en plus d’un jugement sévère quant aux politiques d’intégration des nouvelles technologies dans les écoles.

Mais d’abord, en toute honnêteté, quelques observations favorables qui ne rendent pas justice à l’outil considérant la multitude des fonctions et la brièveté de la présentation :

    • la flexibilité de l’outil dans la personnalisation, par un professeur, de son espace de travail;

    • la possibilité de créer et de gérer des communautés d’échange;

    • le regroupement des services offerts par la GRICS.

Par ailleurs, j’ai été saisi de la complexité du portail. Par moment, j’étais séduit par la multitude de fonctions. Le plus souvent, par contre, je regimbais devant le manque de convivialité de la base de données et la quantité d’opérations à effectuer. Je doute que les utilisateurs prennent plaisir à utiliser ce genre d’outil. Cet aspect mérite considération aujourd’hui quand on sait la quantité d’applications qui se disputent l’attention des utilisateurs et, surtout, la difficulté d’attirer les enseignants aux nouvelles technologies.

Comme outil de communication, je suis surtout déçu de ce qu’on n’y trouve pas. Le courrier électronique demeure un formidable moyen de communication, mais d’autres moyens plus collaboratifs ont récemment fait leur apparition. Parmi les plus grandes lacunes :

    - aucun espace collaboratif (wiki, tableau blanc, etc.);

    - aucune fonction de tagage;

    - pas de fil RSS, ni général, ni spécifique;

    - aucune fonction de téléconférence;

    - aucun blogue.

J’ai également été étonné de constater que le portail générait une adresse de courrier électronique pour tous les élèves selon une formule type qui permet aux élèves de deviner les adresses de tous et chacun. Il faut éviter les pratiques qui facilitent l’intimidation en ligne. D’un autre côté, je doute fort que des adolescents utilisent pareille adresse électronique.

Toutes ces lacunes reflètent l’incapacité des portails fermés à suivre l’évolution fulgurante des nouvelles technologies. Ce patchwork de technologies diverses n’est jamais à la hauteur des technologies de pointe qu’un utilisateur aguerri réussit à assembler dans un écosystème de méthodes efficaces. Comme le faisait justement remarquer un collègue qui a recours à la vidéoconférence pour communiquer avec d’autres professeurs de l’école, « c’est pas d’un portail qu’on a besoin, mais d’un portable! »

D’où l’incohérence d’une commission scolaire qui met la charrue devant les boeufs en offrant un portail sans que les enseignants n’aient d’ordinateur personnel pour l’utiliser. Je ne connais pas d’autres professionnels de l’État qui doivent payer leurs outils de travail. Même les directions d’école reçoivent un portable. Les dossiers de l’administration ont-ils plus de valeur que les élèves?


(Image thématique : Verticle Purple Forbidden Enclosure, par Suzan Frecon)


Par ricochet :

Comment implanter des portables

Décevant portail de litératie de Google

Notre retard des TIC en éducation

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6 réponses

  • «Les dossiers de l’administration ont-ils plus de valeur que les élèves?»

    Poser la question, c’est y répondre si on prend le mot « valeur » dans le sens $ du terme…

    Et la GRICS ne fait pas exception en concevant des outils qui facilitent d’abord les tâches administratives (celles des directions comme celles des profs). Voilà pourquoi je ne m’étonne guère (même si je le déplore autant que toi) du faible potentiel éducatif-collaboratif du portail. Pour des tâches administratives (envois aux élèves et aux parents), l’outil sera sans doute agréable : j’ai bel et bien l’intention de le tester un peu cette année, ayant servi de cobaye pour la « démonstration » de vendredi…

    Il n’empêche également que l’outil ne sera pas à la portée de tous de par la plus ou moins faible convivialité de certaines procédures qui doivent toujours passer par de petits boutons parfois un peu cryptiques.

    Pour ce qui est des adresses courriel des élèves, je crois que je vais tester avec l’adresse générée dans un groupe, puis entrer manuellement les adresses des autres élèves, adresses que j’avais demandées en début d’année de toute façon.

    Par contre, la personne ressource que la grics a envoyée a fait preuve d’ouverture devant mon assez bon nombre de questions et d’observations pendant la semaine-test précédent la rencontre de vendredi. Ceci dit, je ne m’attends pas à des miracles non plus.

    Au moins, j’ai un peu plus l’impression d’avancer un petit peu plus que lorsqu’on a essayé d’implanter Lumi sur le serveur de la CS, avec environ ZÉRO support de la part de la CS où personne (soi-disant) ne connaissait FileMaker Pro Server (CS Microsoft only, rappelons-le) et où il y avait une non-volonté assez évidente de ne pas pousser le projet plus loin, à moins que je n’accepte de tout faire ou presque, ce que je ne pouvais me permettre, faute de temps et de ressources.

    Je testerai donc un peu cette année, avec le temps que j’ai, puis on verra… mais je suis d’accord avec l’idée du portable pour tous : je veux une réduction d’impôts pour le mien, pis ça presse ! (C’est beau rêver…)

  • Merci de ton commentaire, Sylvain, toi qui as une meilleure compréhension du portail Edu-groupe pour avoir eu l’occasion de l’explorer pendant quelques jours. Je suis content que tu aies soulevé la largesse d’esprit de la représentante de la GRICS qui a présenté le portail. J’ai été impressionné, moi aussi, par sa compétence, sa franchise et la qualité de sa présentation.

  • Robert dit :

    J’abonde dans le sens de ta question. Qu’est-ce qui doit venir en premier, le portail ou le portable?

    Savons-nous quel est le portrait du Québec à l’heure actuelle relativement au choix du portail? Edu-Groupe, Mille ou Collaba? Je suis un peu surpris que Mille ne se soit pas plus répandu au Québec compte tenu de ses bases OpenSource. Quel est le coût d’Édu-Groupe par élève?

  • pour répondre à Robert sur sa dernière question, cela démontre bien que ce n’est pas parce qu’un logiciel ne coute rien (en terme de licence s’entend) qu’il est choisi et utilisé. Le coput doit se calculer en coût complet c’est à dire en tenant compte de tous les coûts et pas seulement de la licence (incluant la formation, le support, les personnes qui l’installent et le maintiennent et surtout le fond évoluer. L’intégration et l’ergonomie ont un prix tout comme la sécurité garantie à l’institution et aux parents. La comparaison m’intéresse car je travaille sur ce sujet en France où l’on appelle ces portails des ENT « Espaces Numériques de Travail ». A vous lire…

  • Tiens… il y a longtemps que je n’avais entendu parler de Collaba ou de Mille. Il appert que ces initiatives n’ont pas le même pouvoir auprès des commissions scolaires que le GRICS. J’aimerais bien pouvoir te répondre, Robert, mais on n’a pas voulu me dire combien coûte Édu-groupe. À plus forte raison, j’ignore quel sera le coût total pour la commission scolaire, comme le souligne François, après que tout ait été comptabilisé.

  • Marc Boutet dit :

    Bonjour,

    Pour répondre à votre question :

    - 41 commissions scolaires sur 72 ont implanté Edu-Groupe;
    - 7 commissions scolaires ont implanté Mille;
    - 2 commissions scolaires ont implanté Collaba.

    Marc



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