La normalisation de l’enfance


WenjiNormalTime.jpgOn ne peut être normal et vivant à la fois.
(Emil Cioran)

Un enfant normal, est-ce possible? Est-ce même souhaitable? L’enfant, plus que l’adulte, est un être encore trop beau pour en banaliser le sanctuaire. Et qui ne se souvient pas de la tyrannie administrative et pédagogique de l’évaluation dite normative, l’implacable bell curve pour les cloches? En dépit des efforts pour promouvoir l’évaluation critériée, je connais bien des enseignants qui refusent d’abjurer la religion normative. L’éducation, pourtant, n’a pas toujours cédé au surmoulage.

Je reconnais l’importance des conventions sociales, une forme de normalisation dont la société se charge fort bien. Je reconnais, de plus, l’importance d’un lot de connaissances communes. Toutefois, ce lot ne doit pas s’alourdir en fardeau.

L’école ne doit pas tendre à la normalisation, mais à l’individualisation. La jeunesse, de toute façon, se rebellera toujours contre l’uniformisation. Il y a fort à parier que les déboires des écoles secondaires trouvent largement leur source dans ce refus de l’adolescence à la platitude.

Le sociologue André Turmel de l’Université Laval traite de la normalisation de l’enfance de manière captivante et éloquente dans A Historical Sociology of Childhood, un livre qui vient de paraître aux éditions Cambridge University Press (Le Devoir : L’entrevue – De l’enfant normal à l’enfant normalisé). À tout le moins, l’entrevue accordée au journal Le Devoir est à lire, absolument.


(Image thématique : Normal Time, par Chen Wenji)


Par ricochet :

Les vertus du désordre

Conférence de Ken Robinson sur la créativité


Les systèmes scolaires déforment-ils les jeunes? (Mario tout de go)

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4 réponses

  • Les enfants sont motivés par ce qui excite leur intérêt et font preuve de bonne volonté si c’est réciproque. Une éducation qui rend intéressante la matière ainsi que la méthode avec laquelle elle est fournie saura trouver son auditoire attentif. Les enfants sont heureux et s’épanouissent dans un environnement qui leur paraît dynamique et stable à la fois. Pourquoi faut-il absolument peindre tout en gris et présenter la matière froide? Uniformiser est une méthode qu’il faut doser, comme tous les autres ingrédients d’ailleurs. Les écoles de pensée sont souvent trop penchées d’un côté ou de l’autre pour avoir un regard neutre sur quoi que ce soit.

  • Article très intéressant en effet et qui amène à se poser plusieurs questions sur le rapport de la société envers les enfants. Notre tendance à vouloir confiner tout le monde dans une petite case révèle une certaine obsession à vouloir donner un sens et une explication à tous les phénomènes de notre société et comportements des individus. Je pense que ce besoin découle d’une crainte de perdre le contrôle, d’être confronté à un cas qui sort du cadre «normal» des paradigmes du développement de l’enfant. Ainsi un enfant qui ne répond pas aux critères instaurés par la vision «développementiste» de l’enfant est classé comme «anormal ». Et comme le souligne le sociologue André Turmel, ce comportement entraîne une stigmatisation des élèves, qui a sûrement un impact sur la confiance envers leur capacité de s’intégrer, d’apprendre et de réussir.

  • Jean-Denis Guignard dit :

    Très intéressant,

    Il ne faut pas verser dans l’excès de tout « cataloguer », il faut parfois laisser la chance aux coureurs en acceptant que tous ne se développent pas au même rythme… nous devons accepter de laisser aller un peu nos jeunes … avant de presser le bouton panique… Il faut considérer ces différentes courbes, repères et codes comme des indicateurs nous permettant de mieux comprendre et aider les individus… sinon cataloguer pour « caser » sans rien amener d’autres ne fait que stigmatiser ces personnes…

  • Éliane dit :

    Selon moi, l’enfant est un être pur et spontané qui s’empresse de dire toujours ce qu’il pense sans censure. Je crois que les adultes ont beaucoup à apprendre des enfants et moi je constate que j’apprends beaucoup à leur contact. Certains voudraient que tous les enfants soient sages, bons à l’école, bref, qu’ils se fondent dans le moule que l’école tente de leur donner. Cependant, si par malheur un enfant n’est pas « normal », nous nous empressons de lui donner un code et nous le condamnons à ce code. Je crois que chaque enfant est unique, c’est cela la beauté de la chose et il faut faire ressortir positivement ces différences qui le rend si attachant.



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