L'approche socratique pour promouvoir la collaboration


EganSocrates.jpgChaque fois qu’il y a un changement de support, il y a un Socrate qui engueule un Platon. (Michel Serres)

La pensée critique est-elle subversive? Alors que la philosophie était requise pour l’élite québécoise, le bouleversement qui a suivi le rapport Parent nous en a dispensés. Depuis un bon moment déjà, je préconise le retour de la philosophie en éducation, mais sous une forme plus active et réflexive, en lien avec le pragmatisme social. Par exemple, une étude de l’Université de Stockholm donne à croire que la méthode socratique d’investigation et de discussion dialectique a des effets positifs, à plus ou moins terme, sur la réflexion et la collaboration (EurekAlert! : Socrates in the classroom develops students’ thinking and changes the distribution of power). Entre autres, plus d’élèves s’expriment, une victoire pour l’exercice de la citoyenneté.



(Image thématique : Socrates, par Felim Egan)


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7 réponses

  • Faut ab-so-lu-ment que je te parle très bientôt d’une expérience que nous avons à peine commencé à faire balbutier cette année en 3e secondaire. Des hauts et des bas « de jeunesse », pas tant celle des élèves que la nôtre dans cette expérience comme guide de discussion…

    Je me promets de faire un billet sur le sujet bientôt.

  • Je lui préfère l’approche systèmique…mais j’ai envie de dire peu importe, le tout est d’arriver à sortir du cadre pour parvenir à un meta niveau !

  • Bonjour François,

    Je ne connais pas le contexte «personnel» de ce billet et mon commentaire sera donc, sans doute, en porte-à-faux… Je me permets néanmoins quelques remarques sur un énoncé (le «pragmatisme social») qui me semble lourd d’implicites et d’implications.

    Lorsqu’il est dit que la philosophie devrait être «en lien avec le pragmatisme social» (François), il faudrait (surtout qu’il est justement question de philosophie) d’abord commencer par appliquer l’analyse conceptuelle à l’expression «pragmatisme social». Qu’est-ce que c’est, au juste, le pragmatisme social? Lorsqu’on s’y penche, on se rend compte que les interprétations que les uns en font sont souvent incompatibles avec les interprétations que les autres en font.

    J’ai souvent remarqué que l’évocation d’un «pragmatisme social» (ou d’un appel à la «vraie vie», autre expression analogue dans sa polysémie, tout aussi piégée) partait parfois de bonnes intentions, mais que le flou conceptuel de ce genre d’expression aboutissait trop souvent, chez ceux qui ont un pouvoir de décision, à une mise en application tout autre, voire complètement opposée… La bonne intention éducative ne restant que dans l’esprit de l’un, sa matérialisation pouvant alors devenir non pas une formation de l’individu en tant qu’individu, mais en fonction des besoins du marché où il faut l’insérer…

    Pour bien saisir de quoi il en retourne, il faut regarder les réalisations du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec en ce qui concerne la philosophie dans les cégeps. Lors de la réforme collégiale de 1993 (implémentant dans les cégeps l’approche par compétences, notamment), il y a entre autres eu (1) la suppression du cours de philosophie qui était consacré à l’analyse philosophique (en bonne et due forme) des diverses conceptions du monde (pragmatisme?…), (2) le cours «Éthique et politique» a été transformé en cours «Éthique» et (3) le devis du cours d’éthique a été (ré)orienté vers l’exercice d’une profession, ou du moins arrimé aux programmes d’étude.

    J’ai déjà laissé transparaître, bien qu’indirectement, ce que je pense des effets de telles choses, dans ce billet ET les commentaires qui suivent :
    http://carnets.opossum.ca/patriceletourneau/archives/2007/08/pratiques_de_ra.html

    Qui plus est, pour en rajouter par rapport aux transformations actuelles et les lectures que le ministère peut faire du «pragmatisme social», il importe d’aussi lire ce communiqué:

    http://www.fec.csq.qc.net/index.cfm/2,0,1678,9682,2290,0,html?action=display&BoxID=13904&LangID=2&KindID=1&complete=yes&print=yes

    où on peut en savoir un peu plus sur un «projet» du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec de faire un rapprochement encore plus grand entre la «formation générale» et les «demandes du marché du travail» (un projet tout juste sorti du chapeau, pour adoption en juin, en plein «rush» de fin de session, avec à la clé le «respect» habituel pour la consultation de ceux qui travaillent en première ligne…).

    Enfin, il me semble que l’évocation d’un «pragmatisme social» présuppose l’idée fort discutable que ce serait soit ça, ou alors quelque chose comme les anciens cours classiques… Mais y a tout de même une quarantaine d’années qui nous séparent de l’abolition du cours classique au Québec…

    Si ça peut aider à démystifier (et «démythifier») à quoi peut ressembler un cours d’introduction à la philosophie au 21e siècle, conformément aux devis actuels, on peut jeter un coup d’œil aux traces, messages et divers exemples, là :
    http://pl.philo103.cegeptr.qc.ca/

    Enfin, à mon humble avis, à terme, le «pragmatisme social» en éducation pourrait bien, pour inverser une expression d’Alexandre Koyré, finir par signifier «De l’univers infini au monde clos»…

    Patrice

  • La notion de pragmatisme social se prête effectivement à une multitude d’interprétations. L’histoire nous a maintes fois appris que la philosophie, servie à la sauce politique à des fins sociales, peut engendrer la terreur. L’éducation, dans ces cas-là, est d’ailleurs complice de l’État. Tu fais très bien, Patrice, de nous en rappeler les dangers.

    Je crois cependant que la démocratisation des moyens de communication ne permet plus pareille uniformité de l’opinion publique. Cela est vrai également pour les programmes d’éducation dans lesquels on chercherait à manipuler la pensée par le contenu. Certains se laisseront prendre dans les filets, bien sûr, mais je crois que l’on pourra toujours compter sur une dissension précoce pour faire lever les questions.

    Dans cette nouvelle dynamique de relations en réseaux, j’entrevois une philosophie par laquelle le citoyen se questionne sur le pragmatisme social des choses avant de prendre une décision. Ce pragmatisme, toutefois, ne doit pas faire abstraction de l’éthique ni des autres branches de la philosophie si nécessaires à la vie en communauté.

  • Je ne tiens pas à insister, François, mais je ne parviens pas à bien comprendre le sens du dernier paragraphe :
    - Est-ce que «pragmatisme» est pris au sens philosophique du terme (chez James ou Rorty, par exemple)? Si c’est le cas, je ne parviens pas à comprendre le lien et le sens que ça l’a dans le contexte du paragraphe.
    - Est-ce que «pragmatisme» est pris au sens courant de «Attitude d’une personne qui est orientée vers l’action pratique»? Si c’est le cas, voir mon premier commentaire.
    - Est-ce que «pragmatisme» est pris au sens des approches psychosociales du langage (par exemple: http://www.therapypath.com/fr/language_social.html ) ? Si c’est le cas, là non plus je ne parviens pas à comprendre le lien et le sens que ça l’a dans le contexte du paragraphe.

    Par ailleurs :
    «[…] mais je crois que l’on pourra toujours compter sur une dissension précoce pour faire lever les questions.» (François)

    Seront-elles entendues ?

  • Tu fais bien d’insister, Patrice. Je ne prends pas assez le temps de clarifier philosophiquement ma pensée. J’utilise mon blogue comme un espace où je jette mes idées à la va-vite. Heureusement qu’il y a quelques lecteurs comme toi pour soulever les questions.

    J’employais surtout pragmatisme au sens philosophique, quoique je ne veux pas l’abstraire complètement de son sens courant. Toutefois, la philosophie est si riche d’idées parfois contradictoires qu’il est effectivement facile de s’y perdre en interprétations.

    J’aime bien synthétiser les choses vers une conception globale. Par conséquent, j’adhère davantage au pragmatisme de James et Dewey, plus général, qu’à l’interprétation positiviste de Sidney Hook, par exemple. En ce sens, je crois que le sens des choses se trouve en partie dans leurs effets réels; c’est à rapprocher d’une conception empirique de Chauncey Wright ou de celle de la connaissance dans l’action de Hume.

    Je refuse, par ailleurs, d’exclure l’analyse ontologique. Notre compréhension ne peut venir que de la synthèse des nombreuses facettes des choses. C’est ce que j’entendais en fin de mon commentaire. D’où ma croyance que la philosophie ne saurait être sélective dans ses approches, et encore moins dans un contexte scolaire. Si on veut amener les élèves à des considérations philosophiques dans un contexte d’école obligatoire, il me semble que d’aborder le sujet sous l’angle du pragmatisme a plus de chances de réussir.

    Pour l’instant, je mise sur la réflexion suscitée par le connectivisme. Quant à savoir si la dissension en ligne sera entendue, je n’en sais trop rien. Je préfère m’accrocher à cet espoir plutôt que de sombrer dans la dépression.

  • En lisant votre article, j’ai pensé à l’ouvrage que j’ai offert à ma nièce de 7 ans, à lire accompagné d’un adulte (du moins vers 6/7 ans) : « Le grand livre des contraires philosophiques ». J’ai trouvé cet ouvrage très réussi !

    http://www.ricochet-jeunes.org/parudet.asp?livrid=703154527



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