L'éducation n'appartient pas à l'école


RectangleCircleMalevich.jpgDans le monde entier, l’école nuit à l’éducation parce qu’on la considère comme seule capable de s’en charger. (Ivan Illich)

L’éducation commence bien avant l’école. Même durant la traversée scolaire, les programmes de formation n’apportent qu’une parcelle des apprentissages faits par les jeunes. À partir du moment où les enfants se retrouvent avec leurs pairs, la mainmise des parents sur l’éducation s’estompe peu à peu. Judith Rich Harris, psychologue du développement de l’enfant et auteure de The Nurture Assumption, affirme même que les pairs ont plus d’influence que les parents sur le développement de la personnalité (Prospect : Why home doesn’t matter). Si tel est le cas, les effets de ce socioconstructivisme seraient exponentiels dans la mesure où les jeunes changent par adaptation à l’environnement. En ajoutant à l’équation le maillage technologique de cet environnement, on peut supposer que l’école perd aussi de son influence.

L’école semble ignorer qu’elle n’a plus le monopole de l’éducation générale. Qu’on soit pour ou contre n’y change rien : les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont changé la donne. N’en déplaise aux éducateurs, les ordinateurs sont désormais des centres personnels et sociaux d’apprentissage. Quand les connaissances accessoires (par opposition aux connaissances de base) se trouvent au bout de quelques clics, la mémorisation artificielle perd de son intérêt au profit des savoir-faire, de l’objectivation, de la créativité, de la méthode, de la quête de sens et du soi. Dans ces conditions, le professeur n’est plus l’instructeur sur la berge qui explique comment franchir le fleuve; il est même plus qu’un passeur, il est le gabier d’expérience qui guide les moussaillons dans la traversée.

Je conviens que l’immersion technologique n’est pas encore le lot de tous les élèves. Mais il y a lieu de s’inquiéter du silence dans les écoles. Où prépare-t-on l’avenir de l’éducation? Je suis stupéfait d’apprendre que l’on considère encore la capacité à « déplacer du texte, copier-coller, couper-coller, agencer les paragraphes » comme une habileté TIC méritant d’être évaluée (Variations sur thèmes : Plongeons dans le vide…). Michel Desbiens a raison de souligner que le temps n’est plus à l’intégration des nouvelles technologies, mais à leur utilisation créatrice.

Michel, un enseignant à PROTIC, appartient à cette nouvelle génération de parents scolarisés et techno-avisés qui créent à la maison des environnements d’apprentissage branchés sur le monde (Cristal cognitif : Travail et éducation en famille). Avec sa conjointe, Nathalie Chantal, ils ont réaménagé la cuisine en fonction des besoins d’apprentissage. Comme le dit Michel :

Il faut absolument explorer le potentiel de ses ordis en dehors du cadre scolaire: dans nos familles, dans nos arrondissements.

Il est important, dans ce contexte, de réunir tous les acteurs de l’éducation dans une nouvelle dynamique de l’apprentissage. Les nouvelles technologies de la communication servent justement à cela. Tôt ou tard, nous n’aurons d’autre choix que de redéfinir le rôle des écoles. Sans quoi elles subiront le même sort que les églises.

(Image thématique : Rectangle et cercle, par Kasimir Malevitch)


Par ricochet :

Le Canada investit moins en éducation

Incurie du système d’éducation

L’école, lieu d’éducation ou d’Éducation

L’éducation de l’I-génération

L’éducation dans un contexte de mondialisation

Désillusion de l’éducation

Le chaos appliqué à l’éducation

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