Le plagiat : quand l'école ne fait pas son boulot


Dans un cas de plagiat, l’école est prompte à punir l’élève. L’idée de blâmer les enfants et les adolescents semble venir instinctivement aux adultes. Sans absoudre totalement les élèves de leur faute, l’école doit reconnaître sa part de responsabilité, d’une part en demandant des travaux qui ont peu d’intérêt aux yeux des élèves, et d’autre part en négligeant d’inculquer aux élèves l’essence de l’éducation. Les enfants ne sont pas différents des adultes, en ce qu’ils veulent comprendre. Le modèle scolaire d’enfants obéissant aveuglément au professeur appartient à un behaviorisme révolu. La compréhension n’est-elle pas d’ailleurs une qualité fondamentale de l’éducation ?

Paula Stiles a raison de dénoncer la sottise des élèves qui trichent ou qui copient les textes d’autrui (Associated Content : Plagiarism for Dummies: Why Cheating Students Are Missing the Point of Education) :

Learning is the point, especially in college.

College students who cheat or plagiarize don’t get this. The grade may seem the most important thing, but that’s not why students, or their parents, paid all that money to get into a college or university. It’s not why you get a college degree and it’s not why employers will hire a college graduate. A student goes to college for one reason: to get an education. In this education, students learn skills that will help them in life and help them get a job.

Si les connaissances déclaratives sont réellement la finalité de l’éducation, alors l’école est dépassée par la concurrence. Car les jeunes aussi sont submergés d’information. Et ils savent trouver celle qui les intéresse. D’où l’importance pour l’école d’aller au-delà des connaissances, du moins jusqu’aux compétences (au-dessus des compétences il y a la finalité, mais ça c’est une autre histoire). À partir du moment où les connaissances sont facilement accessibles, il devient plus utile de savoir les chercher que de les mémoriser. C’est l’essence même du changement de paradigme qu’impose internet : quand l’information s’avère une denrée précieuse, on a avantage à la mémoriser, mais quand elle est omniprésente, on gagne à la traiter. Le rôle de l’école, dès lors, consiste à montrer comment utiliser efficacement l’information. Car les savoir-faire ne s’acquièrent pas de visu, mais dans l’action.

Les élèves, cependant, ignorent tout de la valeur future des programmes scolaires, dans la mesure de leur pertinence. Si l’école ne réussit pas à justifier ce contenu, on ne saurait blâmer les jeunes d’exercer leur jugement critique, voire de s’abandonner au plagiat. À l’école, donc, de persuader les élèves de l’importance de l’éducation qu’elle leur offre. On a beaucoup péché par complaisance, sur ce plan, sachant que la clientèle est captive (de par la loi). Pas étonnant, dans ces conditions, que les élèves répondent par l’indiscipline.


Par ricochet :

Étude : les garçons plus sujets au plagiat

Creative Commons pour contrer le plagiat à l’école

Le risque de punition est aussi source de motivation

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5 réponses

  • Oui, tu as raison François. Ici aux États-Unis, la compétition pour une bonne université est si forte que les élèves font presque n’importe quoi pour être admis. Ce que les profs dans mon école utilise est turnitin.com. C’est un moteur de recherche (ou base de données?) qui cherche des citations contestables et suspicieuses sur Internet. Avec les profs d’anglais, c’est obligatoire de la part des élèves de vérifier ce qu’ils avaient écrit dans leurs essais, etc. et il est partie de leur note pour ces devoirs-là. Je ne sais pas si on peut utiliser avec d’autres langues sauf anglais, mais il est peut-être bonne idée de le voir. Il y a aussi des idées pour combattre la plagit sur ce site web. http://www.turnitin.com

  • Dans le monde réel, les tâches qu’on accomplit sont des tâches collectives. L’école, en France au moins, privilégie les tâches individuelles. Quand nous collaborons, nous ne sommes jamais 2 à faire la même chose. Dans le cadre individuel, chacun reproduit ce que fait son voisin. Le plagiat est une conséquence naturelle de l’individualisme.

  • Ce message est pour Christian. Vous avez raison jusqu’à un point. L’individualisme continue à fortement vivre dans la culture américaine. C’est pourquoi que la partie républicaine essaie de couper des programmes de l’assistance publique comme WIC (Women, Infants and Children) qui aide les mères appauvries à nourrir correctement ses enfants), de la sécurité sociale, de l’éducation (comme les petits déjs pour les enfants appauvris. Et No Child Left Behind qui punit les écoles qui ne peuvent pas réussir aux examens standardisés.) C’est aussi pourquoi que notre culture de « victimisation » continue à exister (parce que l’individualisme la nourrit) et on intente donc beaucoup de procès et que les avocats qui spécialise en fautes professionelles et en néglience gagnent beaucoup d’argent et on ne respecte plus le système judiciaire dans la même façon. (Oui, il y en a qui sont importants comme la négligence des médécins, etc., mais il y en a beaucoup qui ne sont pas nécessaire. En fait, beaucoup de règlements existent dans les écoles à cause de la peur des procès au lieu du bien des élèves. Par exemple, il y a des écoles qui ne permettent pas des voyages à l’étranger à cause de cela. Et si on est prof, on doit être prudent.) Ce qui continue à aider à exister cette culture de l’individualisme ici est la mentalité que chacun est pour soi-même et par conséquent, il y a une tendance de percevoir beaucoup de « compétition » ( en dépendant de l’individu) dans notre société. Par exemple, on voit beaucoup d’amis dans le lieu de travail qui quittent l’un(e) l’autre parce que l’un(e) fait quelque chose contre l’autre, et on se sent comme on ne peut pas confier en personne. Et parmi les élèves et leurs parents, il y a la mentalité que réussir à la vie dépend de l’université (qui est vrai dans une certaine mésure). (Il y a des parents qui s’inquiètent de l’école maternelle comme résultat.) Comme résultat, on voit pas le plagiat des élèves en échec scolaire, mais des élèves plus doués qui gagnent « A’s » et « B’s »presque tous les temps. Et pourquoi? Peut-être la peur de rater. Alors, le plagiat se dérive de cette mentalité individualiste et de cette culture de l’individuelisme. Cependant, à mon avis, le plagiat est un choix qu’on fait. Et je comprends François dans le cadre educationnel parce qu’il y a un besoin. Et le plagiat , au moins ici aux États-Unis, peut être une tâche collective. On peut vendre et acheter des rédactions, etc. sur Internet par exemple. cependant si un groupe d’élèves le faisait ici, on en disciplinerait tous. ( en dépendant qui a fait quoi)

  • Tout à fait d’accord avec toi François quand tu dis ceci : «Sans absoudre totalement les élèves de leur faute, l’école doit reconnaître sa part de responsabilité, d’une part en demandant des travaux qui ont peu d’intérêt aux yeux des élèves, et d’autre part en négligeant d’inculquer aux élèves l’essence de l’éducation.»

    Il est effectivement de notre ressort d’enseignant de dire aux élèves pourquoi il est important de comprendre et non pas de mémoriser des faits. Il est aussi vrai que la plupart du temps un élève va faire du plagiat, car il ne semble ps intéressé par le travail; il faut donc que nous lui indiquions ce que ce travail va apporter pour son avenir, pas nécessairement immédiat, mais il faut que l’élève voit un but à atteindre pour lui et non pas seulement un résultat qui lui permettra de poursuivre ses études à un niveau supérieur.

    Mais je dirais que, dans certaines situations, il peut nous arriver de demander un travail pour occuper les élèves. Je ne valorises pas cette façon de faire, mais elle peut bien dépanner parfois…

  • La candeur est toujours appréciée. Merci, Mathieu, d’avouer franchement que le fossé entre la théorie et la pratique en éducation n’est pas toujours une question d’ignorance, mais souvent causé par la lourdeur de la tâche, laquelle n’alloue pas le temps requis pour bien faire les choses.

    Le premier commentaire de Margarita me laisse perplexe. Si je comprends bien, tous les professeurs d’anglais doivent soumettre les travaux des élèves au détecteur de plagiat qu’est Turnitin. Mais c’est qu’ils doivent consacrer un temps fou à cette tâche ! Et je devine que cela oblige tous les élèves à remettre une version numérisée de leurs travaux, sans quoi le professeur doit numériser le tout. Si c’est effectivement le cas, c’est donc que le peu de temps alloué à la pédagogie est sacrifié à des mesures de contrôle, ce qui est une aberration.

    Heureusement, les écoles canadiennes ne vivent pas à ce point sous la menace constante des poursuites judiciaires. Néanmoins, je suis très réceptif au commentaire de Christian relativement aux conséquences néfastes de l’individualisme détaché de ses obligations sociales. Je lui sais gré d’apporter une nouvelle condition pour contrer le plagiat. La collaboration n’élimine pas nécessairement le plagiat, mais elle donne une fichue leçon à ceux qui sont pris sur le fait. J’ai des élèves qui sont venus me voir en pleurant pour avouer leur faute, me suppliant de ne pas pénaliser leurs coéquipiers pour le plagiat dont ils étaient les seuls responsables. C’est une leçon qu’ils ne sont pas prêts d’oublier.



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