L'incohérence du MELS dans l'achat du matériel didactique


Plus tôt cette semaine, j’ai appris que l’argent consacré à l’achat de matériel didactique dans le cadre du nouveau Programme de formation était réservé au matériel approuvé par le ministère de l’Éducation. Pour ma discipline, ce matériel ne comprend qu’une série comprenant le matériel usuel (guide du maître, manuel de l’élève, cahier d’exercice, cassettes audio et cédérom). La routine, quoi. Rien de stimulant pour celui qui veut réellement donner dans l’esprit de la réforme, c’est-à-dire adopter des stratégies d’enseignement reposant, selon les besoins, sur l’apprentissage individualisé, l’action learning, l’apprentissage par découverte, l’apprentissage par projet, le brain-based learning, et j’en passe. Comme je ne pourrai pas utiliser la part qui me revient pour acheter un projecteur multimédia (canon) ou un tableau électronique, je devrai me passer de matériel didactique.

Il appert qu’il y a une incohérence crasse à promouvoir une réforme tout en interdisant l’achat du matériel qui pourrait en assurer la réussite. Comment expliquer pareil gâchis autrement que par le lobbying des maisons d’édition. Malgré mon calme apparent, j’enrage (ou est-ce plutôt du découragement ?). Et je ne suis pas le seul ; plusieurs de mes collègues ont fait une demande pour avoir un canon dans leur classe, eux qui disposent déjà d’un ordinateur portable (acheté à leurs frais, évidemment). On s’arrache déjà le seul canon mis à notre disposition, malgré les désagréments, comme charrier le lourd boîtier, puis installer et ranger l’appareil chaque fois qu’on l’utilise.

Il existe tant de matériel extraordinaire et actuel sur le Web qu’il est aberrant de vouloir limiter les enseignants au contenu d’un manuel vite périmé. D’autant plus qu’il est gratuit et que certaines initiatives cherchent à créer du contenu scolaire de source libre (eSchool News : Wikibooks to offer free eTexts for education). Certains l’ont compris, comme cette école qui s’est débarrassée de tous ses manuels scolaires (BBC : US school swaps books for bytes). N’est-ce pas la meilleure façon d’assurer l’intégration des domaines généraux de formation du nouveau Programme de formation ?

Et que penser de cette autre incohérence d’un système scolaire qui forme des professionnels de l’enseignement à grands frais, pour ensuite les confiner dans les ornières d’un manuel ? Les guides d’utilisation, c’est fait pour des techniciens. Ensuite, on demande aux enseignants d’être créatif. C’est sûr… on ne nous laisse guère le choix ! Mais qu’on ne s’étonne pas si plusieurs jettent l’éponge. Il n’y a pas à dire, je ne comprendrai jamais la logique des fonctionnaires et des administrateurs.


Par ricochet :

Des « canons » plus que des livres

Nouveau modèle de matériel didactique

Vous pouvez suivre les commentaires en réponse à ce billet avec le RSS 2.0 Vous pouvez laisser une réponse, ou trackback.

2 réponses

  • « … la logique des fonctionnaires et des administrateurs. »

    Je viens juste de lire cette jolie citation dans Le mot du silencieux d’Albert Brie :

    « Bureaucrate : L’une des pièces maîtresses du char de l’État : le frein. »

    Je suis tellement découragé par ces administrateurs qui sont incapables de mettre leurs culottes.

    Je te souhaite bon courage.

  • Savoureuse citation d’Albert Brie. Merci de la partager, Gilles. Finalement, tu as raison : il s’agit bien de découragement. La rage n’est qu’une réaction passagère, comme un abcès.



Laisser un commentaire

*