Réactions sur la lourdeur de la tâche


Les généralités, malheureusement, sont impersonnelles. On ne s’y identifie guère tout à fait. Et comme les lois, elles ont quelque chose d’opprimant. Quand on vit en marge, elles cinglent tout autant que la tyrannie de la majorité. Voilà pourquoi j’ai été piqué au vif par la lettre d’un enseignant publiée dans Le Devoir et sur laquelle Clément a attiré notre attention. Cet enseignant affirme entre autres que la tâche d’un enseignant n’est guère plus lourde que dans une autre profession. Ce genre d’ineptie m’enrage. …

Non pas que je veuille me plaindre de mon sort. Seulement, dans le débat qui secoue présentement la réforme de l’éducation au Québec, il est important de bien saisir les conditions dans lesquelles travaillent les enseignants. En faire abstraction mènerait la réforme à un échec certain.

Deux points, surtout, distinguent l’enseignement de la plupart des autres professions : le nombre d’heures de travail et le stress. Une étude anglaise indique que les enseignants de ce pays font plus d’heures supplémentaires que tout autre métier (BBC : Teachers top unpaid overtime poll). Rien ne porte à croire que la situation soit différente au Québec. Quant au stress, plusieurs études ont démontré que l’enseignement se situait parmi les professions les plus éprouvantes à cet égard ; certaines études la situent même au premier rang. Le taux d’abandon des jeunes enseignants chez nous n’est pas qu’une statistique, c’est également un symptôme.

Des inégalités subsistent également au sein de la profession. Personne, semble-t-il, n’ose en parler tout haut. C’est un sujet que les syndicats, dans leur grand souci de maintenir l’harmonie entre les membres, font semblant d’ignorer. Et les administrateurs n’ont que faire de cette patate chaude. Ceux qui enseignent le français au secondaire, pour ne donner que cet exemple, ploient sous le poids des corrections. Est-ce un hasard si dans mon école les professeurs de langue sont toujours les derniers à quitter l’école ?

Les inégalités se manifestent de plusieurs façons. Elles sont apparentes entre les niveaux d’enseignement, entre les disciplines, et entre les milieux. Il y a bien égalité de droit, mais non de fait.

Les dénominateurs communs, pour revenir aux généralités, ont un effet d’aplanissement qui facilite l’administration, mais qui nuit à l’institution. Un rouleau compresseur n’est guère une machine inspirante. Par conséquent, je préfère les aspérités des cas individuels, comme celui de cette enseignante.

Par ricochet :

Conditions de travail = plus d’apprentissage

Le travail supplémentaire des enseignants

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4 réponses

  • André Chartrand dit :

    J’avais déjà lu la lettre moi aussi. J’ai préféré ne pas y réagir car, comme vous, elle m’a piqué au vif.

    Par contre, j’avais manqué celle de l’enseignante. Je suis bien heureux que vous l’ayez portée à ma connaissance.

  • Est-ce que nous ne sommes pas un peu collectivement responsable de l’image que le grand public a de notre profession (à laquelle je m’identifie encore)?

    Est-ce qu’il n’y a pas un piège dans le fait que, trop souvent, les moment que nous choisissons pour faire connaître ses exigences coïncident avec des périodes de négociation?

    Peut-être faudrait-il écrire plus souvent, décrire, illustrer, expliquer, raconter, etc.

    Je ne sais pas, je pose la question…

  • La réponse à ta première question, Clément, est certes oui. Deux façons d’y remédier, à mon avis : élargir la vitrine virtuelle de l’école, à l’aide des TIC, et ouvrir les portes des écoles et, surtout, des classes à la communaut頗 par laquelle j’entends les politiciens, les fonctionnaires, les médias, les commissaires, les administrateurs scolaires, les parents, etc.

    Quant à la deuxième question, il est difficile de faire autrement, considérant que les négociations ont tendance à s’éterniser pendant 3 ans. Ne sommes-nous pas toujours en négociation ?

    Enfin, pour ce qui est de « écrire plus souvent, décrire, illustrer, expliquer, raconter, etc. », n’est-ce pas ce que nous faisons sur nos blogues ? ;-)

  • Évidemment François, ce n’était pas toi que je tentais de convaincre de la nécessité d’écrire!

    C’est d’ailleurs à la base de ma conviction et du temps que j’investis dans les carnets Web… l’ouverture de l’école sur la communauté (et inversement) est encore et toujours mon dada.

    Cela dit, il me semble que les principaux « porte-paroles » du monde enseignants, et les syndicats en tous premier lieu!, devraient s’intéresser beaucou plus à cet univers, l’apprivoiser et s’en servir. En faire la promotion aussi.

    M’enfin… je n’ai probablement à convaincre personne qui lit ce carnet!



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