Les avantages d'une langue seconde

C’est le genre de nouvelles qui réjouit un professeur d’anglais : une étude (PDF) indique que le bilinguisme accroît la matière grise dans les parties du cerveau responsables de la langue, alors qu’une autre étude (PDF) révèle qu’il ralentit le déclin des facultés cognitives et mnémoniques relié au vieillissement (Eide Neurolearning Blog : Bilinguilism Is Good for You). Mais ce n’est pas tout.

Je prends toujours le temps, en début d’année, de faire prendre conscience aux élèves des raisons pour lesquelles ils doivent apprendre l’anglais. Puisque mon blogue d’école est dans la langue de Shakespeare, je les présente ici en français :

    Le bilinguisme accroît la matière grise dans les parties du cerveau qui traitent le langage (source).
    Le bilinguisme favorise la compréhension des diversités culturelles et un esprit ouvert (source).
    Le bilinguisme offre de meilleures chances d’emploi (source).
    L’anglais donne accès à un vaste contenu de connaissances (source).
    L’anglais est aujourd’hui une ressource inestimable pour voyager ; l’anglais est officiellement reconnu par plus de 75 pays (source).
    L’anglais constitue un atout majeur à l’ère de la mondialisation : un tiers de la population mondiale parlera bientôt anglais (source), alors qu’elle est déjà la langue internationale des sciences et des affaires (source).
    Les personnes bilingues ont, en moyenne, un revenu annuel supérieur de 6 000 $ (source): multiplié par 35 années de travail, cela fait 210 000 $ ; avec les intérêts cumulés, la somme dépasse les 500 000 $.
    • L’anglais facilite l’accès à l’université ; or, la valeur d’un diplôme, échelonné sur toute une vie, est estimée à 1 million $ (source 1, source 2).
    Un diplôme universitaire ajoute 5 ans à l’espérance de vie (source (PDF)).
    Ceux qui parlent une langue étrangère ont plus de sex-appeal (source).


Par ricochet :
Les langues et le sex-appeal
Mondialisation de l’anglais
L’anglais, langue de travail en France

L’apprentissage d’une langue seconde – prise 2 (Réflexions d’un enseignant)
Retour à l’anglaise (Foire aux idées)

Motivation : coopération ou compétition ?

Les nouvelles approches pédagogiques font une large place à la coopération. Et c’est tant mieux. On ne saurait sous-estimer l’importance de la coopération dans le développement cognitif, affectif et social, de même que sur le plan de la méthode. Néanmoins, il serait bête, dans la classe, de bannir complètement la compétition. Je le vois tous les jours : l’idée de rivaliser avec leurs pairs stimule les élèves. La fougue de la jeunesse attise certainement cet esprit de compétition. Or, une étude (PDF) de l’Institute for Learning and Brain Sciences de l’Université du Washington révèle les différences dans l’activité du cerveau de la coopération et de la compétition (Eide Neurolearning Blog : What Motivates You? Cooperation or Competition?).

Si, pour un contexte déterminé, l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (fMRI) indique des zones d’activité cérébrales distinctes pour la coopération et la compétition, les choses ne sont pas aussi simples dans l’effervescence de la classe. L’observation nous apprend que certains élèves sont davantage portés vers la coopération, tandis que d’autres préfèrent la compétition. Dans leur for intérieur, toutefois, tous les élèves cherchent à surpasser leurs pairs : c’est l’instinct animal. Un bon enseignant cherchera à canaliser cette force vers des activités d’équipe constructives, c’est-à-dire de nature coopérative, plutôt que de façon négative en opposant les élèves.

Je me méfie généralement des dichotomies qui favorisent un pôle à l’exclusion de l’autre. L’expérience nous apprend qu’on a généralement tendance à osciller de l’un à l’autre, selon les circonstances. Pourquoi, sinon, l’évolution nous aurait-elle dotés de tant de capacités ? Et puis, comme éducateur, j’ai appris à aimer la diversité. Pour revenir sur la question de la motivation, celle-ci est sûrement plus grande quand on mise à la fois sur la coopération et la compétition (amicale, j’entends), par exemple lorsque l’émulation aiguillonne le travail d’équipe.

Mise à jour : 20 novembre 2005 | Fernette et Brock Eide présentent la suite de leur premier billet sur la coopération, le second billet portant davantage sur l’aspect compétitif de la motivation : Reflecting on Competition.

Au même moment, le magazine Time publie un article fascinant sur l’ambition en tant qu’agent de motivation : Ambition: Why Some People Are Most Likely To Succeed.


Par ricochet :
Motivation, plaisir et gratification
Le point sur la motivation intrinsèque
Il n’y a pas que les notes qui comptent

Cerveau multifonctionnel

L’enseignement ancestral repose sur la croyance que l’apprentissage doit être linéaire et compartimenté. Il y a une certaine logique à faire les choses une à la fois, séquentiellement et à l’unisson, comme l’histoire l’a amplement démontré sur les champs de bataille. D’une certaine façon, la transmission du savoir selon le modèle universitaire, lequel par la suite a servi d’exemple à l’école publique, a été le précurseur du travail à la chaîne. C’était sous-estimer la capacité du cerveau. …

Je n’invente rien en affirmant que le cerveau est capable de tâches complexes. Si ce n’était pas le cas, nous serions encore à l’âge de pierre. Néanmoins, je sens le besoin de le redire quand je vois les tenants de l’enseignement simplifié vampiriser les écoles, malgré que les sciences cognitives [lien New Horizon désactivé] et la psychopédagogie [lien New Horizon désactivé] stipulent que l’apprentissage gagne à être fait par le biais d’activités complexes, selon le développement de l’individu.

Depuis quelque temps, je m’intéresse au phénomène du multitasking (multiplicité des tâches). Jusqu’ici, la recherche à fait valoir les effets néfastes du multitasking (American Psychological Association : Is Multitasking More Efficient? Shifting Mental Gears Costs Time, Especially When Shifting to Less Familiar Tasks ; NPR : The Thief of Time - Multitasking Is Inefficient, Studies Show ; Center for Cognitive Brain Imaging : Multitasking drains brain ; C Magazine : Multitasking Madness). Néanmoins, il faut distinguer la surabondance de tâches, cause de stress, de notre propension naturelle à faire plusieurs choses en même temps. Qui parmi nous se contente de faire une seule chose à la fois ? On conduit en même temps qu’on écoute la radio, ou on écrit en même temps qu’on navigue sur le Web. Dans la classe, je constate que les élèves s’adonnent à plusieurs activités quand ils sont en travail libre ; et, de toute évidence, je ne pourrais pas enseigner si mon cerveau était monopolisé par une seule tâche.

L’hypothèse que je soulève est que le multitasking constitue la prochaine étape dans l’évolution du cerveau. La paléoanthropologie nous a appris que les transformations de l’environnement ont eu un impact déterminant sur l’évolution du cerveau (Québec Science : Homo climatus). Pourquoi n’en serait-il pas de même avec les bouleversements amorcés par la révolution industrielle et qui se poursuivent avec la révolution informatique ? Puisqu’il est beaucoup question de l’accélération de l’évolution, il est probable que le cerveau s’adapte en augmentant sa capacité d’action. Nous savons déjà que les tâches spécifiques répétées entraînent le développement des régions cervicales sollicitées. Il n’y a pas lieu de croire qu’il en soit autrement dans son développement global.

Les sciences cognitives ont démontré que notre mémoire de travail ne saurait traiter plus de sept à neuf unités d’information simultanément (Miller, Gagné). Aussi suis-je d’accord avec Kathy Sierra qui défend l’importance de se concentrer sur une seule tâche ; mais seulement lorsque la tâche est complexe. Certaines tâches, moins complexes, laissent place à l’inclusion d’activités extérieures, surtout si celles-ci sont relativement automatisées.

C’est en poussant les limites du cerveau, de façon naturelle, que nous contribuerons à son évolution. Forcément, nous sommes loin d’avoir atteint les limites de son développement. Si le multitasking devait accélérer les apprentissages, les conséquences pour l’enseignement seraient énormes. C’est peut-être la seule façon pour l’homme de maintenir sa supériorité sur la machine.

Post-scriptum :

Immédiatement après avoir publié ce billet, je tombe sur un article fort à-propos dans eSchool News (Today’s kids are ‘media multitaskers’) au sujet d’une étude de la Kaiser Family Foundation qui a fait jaser cette semaine : Generation M: Media in the Lives of 8-18 Year-olds. Selon eSchool News, l’étude ne récuse pas d’emblée le multitasking : « What effect [multitasking] has on the often fragile ability of kids to focus is unclear because detailed research is fairly new, said Vicky Rideout, the foundation vice president who directed the study. »

Mise à jour, 12 juin 2007 | Un article intéressant de la CBC (Are cellphones and the internet rewiring our brains?) avance justement l’hypothèse que les natifs des nouvelles technologies de la communication sont plus habiles au multitasking que les générations précédentes, un phénomène qui serait la conséquence de la plasticité neuronale et de l’adaptation à l’environnement.

Mise à jour, 13 avril 2009 | L’hypothèse selon laquelle le multitasking modifie le cerveau gagne du terrain. Un article de la chaîne NBC relate l’avis de Bruce Hensel, chercheur à UCLA et l’auteur de iBrain (NBC13 : Video: Is multi-tasking changing our brain function?).


Par ricochet :
Ressources pour comprendre le cerveau

Principes d'apprentissage

Il n’y a rien de plus pratique qu’une bonne théorie, dit-on. Surtout dans la pratique professionnelle — et pas seulement en enseignement — où je vois trop souvent l’imitation travestie en savoir. Sans vouloir rabaisser l’enseignement à un réductionnisme de règles, reconnaissons tout de même que les fondements illuminent l’action.  …

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TIC et programmes d'enseignement

La lecture de cet article sur l’évolution des compétences des élèves dans l’utilisation des TIC mène à plusieurs constats : …

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La robotisation du cerveau

La course à l’intégration du microprocesseur et du cerveau est lancée depuis déjà quelques années. Je m’inquiète qu’on en soit plus ébloui qu’alarmé. …

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