Zoomii et la virtualisation du réel


FleckBookcase.jpgLe chiffre d’affaires des librairies est un fichu baromètre pour la société. (Denis Guedj)

Quoique je reste vigilant, je ne m’inquiète pas trop de l’intrusion des nouvelles technologies dans la sphère humaine. Depuis l’utilisation de la pierre à feu, l’homme vit en symbiose avec la technologie; et l’ajustement de nos fonctions internes remonte aux premières herbes médicinales. Jusqu’ici, l’intelligence collective a toujours eu raison, à la longue, des erreurs de parcours. Il y a tout lieu de croire que les choses continueront d’en être ainsi, d’autant plus efficacement dans un monde hyperconnecté. Qui sait? peut-être même réussirons-nous un jour à prévenir la guerre.

La technologie évolue en fonction de nos besoins, le sujet et l’objet interagissant dans une dépendance évolutive portée par leur mutualité. Or, le besoin ramène tôt ou tard la technologie à la nature de l’homme, dans la mesure où elle n’aura pas, par l’effet de sa créativité, aussi légèrement contribué à la transformer. La capacité d’adaptation et la plasticité neuronale font en sorte que cette transformation affecte plus rapidement l’esprit que le corps.

Forcément, il faut laisser le temps aux nouvelles technologies d’évoluer vers le naturel de l’homme. Les premières tentatives sont toujours imparfaites, parfois contraintes par les technologies afférentes. La bande passante et la puissance des microprocesseurs, par exemple, constituent des limites à la transmission. L’augmentation de leur capacité débouchera sur des possibilités insoupçonnées.

Ainsi, le monde virtuel tend vers la réalité, notamment au regard de la visualisation pour laquelle le cerveau est plus adapté. La librairie virtuelle Zoomii en est un bon exemple (source : Jane Hart). Le réalisme est si saisissant qu’on en oublie la technologie. On découvre vite la superficialité du site en comparaison d’une vraie librairie, mais l’on verra sans doute bientôt des mash-ups de cet environnement et des livres en ligne à la Issuu ou Zegapi.


Le danger, bien sûr, est dans la normalisation des usages, la culture de masse sur laquelle reposent plusieurs modèles économiques, et l’émoussement de l’individualité. Je crois cependant que notre idiosyncrasie nous en préservera, quoique l’éducation doit impérativement miser sur cet aspect du développement. Malheureusement, l’école tend davantage à l’uniformisation qu’à l’individualisation.

Nous célébrerons toujours, cependant, les réalisations individuelles, comme en fait foi la popularité d’Afrigadget (TIME : 50 Best Websites 2008).

Par souci de clarification, et avant qu’on ne m’accuse d’ignorance (pas de celle-là, du moins), je considère bien le monde virtuel comme réel. Immatérialité ne signifie pas non-être. J’entends seulement par réalité virtuelle un environnement particulier défini par sa nature. Il s’agit d’un univers parallèle, entièrement créé par l’homme, qui invite à la participation collective. Incapable de créer un être autosuffisant, selon la croyance d’un dieu créateur, il a conçu un moyen détourné, dont nous ignorons l’aboutissement. Nous n’avons plus quère le choix que de nous en remettre à notre génie collectif.


(Image thématique : Bookcase, par Ralph Fleck)


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