Les enfants invisibles de la classe


TimidChowSagar.jpgLa timidité est une forme de politesse. (Jacques Dutronc)

Chaque classe a son lot d’enfants effacés. Pour certains, qui préfèrent écouter et trouver les solutions par eux-mêmes, ce n’est qu’une question de tempérament. D’autres, cependant, disparaissent derrière l’angoisse de l’incompréhension ou un quelconque traumatisme psychologique. Ce sont ces oisillons qui ne lèvent jamais la main pour recevoir la becquée ou qui ne s’approchent jamais du professeur pour obtenir de l’aide. Dans un cas comme dans l’autre, l’école néglige leur épanouissement social, pour ne pas dire l’épanouissement tout court. Quand le problème se manifeste enfin, il est généralement trop tard.

Dans le premier d’une série de rapports pour améliorer l’enseignement au primaire, le Department for education and skills (Grande-Bretagne) se penche sur les « enfants invisibles » et les « zones de comfort » en apprentissage (communiqué). Le rapport identifie les caractéristiques de ces deux phénomènes, de même que celles des élèves qui accusent un retard en littératie et en mathématiques. De plus, il propose des stratégies pour remédier aux deux premiers.

L’une des stratégies proposées pour venir en aide aux enfants invisibles fera sursauter plusieurs professeurs : ne pas faire lever la main quand on pose une question à la classe (BBC : No ‘hands-up’ call to help pupils). Sans nécessairement bannir la pratique, il y lieu d’en faire un usage réfléchi plutôt que systématique. Le rapport propose quelques solutions souvent plus efficaces :

    • choisir qui répondra [suggestion : recourir à un système aléatoire]

    • discussion en pairs avant de répondre

    • accorder un temps de réflexion avant de demander la réponse

    • s’assurer que les élèves ont compris les objectifs d’apprentissage.

À cela, j’ajoute :

    • écrire la réponse [accepter les réponses écrites pour éviter le ridicule]

    • bien clarifier la question

    • utiliser des moyens visuels

    • butiner la réponse en passant d’un élève à l’autre

    • sécuriser les élèves en allouant un indice

    • encourager la concertation

    • utiliser un portable pour trouver la réponse.

Mise à jour, 5 juin 2007 | Certaines solutions s’ajouteront au fur et à mesure qu’elles me viennent.

(Image thématique : Don’t Be Timid Madam Chow, par Beatricia Sagar)


Par ricochet :

Détourner le regard pour mieux répondre

Le hasard pour accroître l’attention en classe

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5 réponses

  • Mélanie dit :

    Tellement vrai! Étant une de ces anciennes « invisibles », et qui était, de plus, première de classe, me rendait totalement translucide! Je n’ai jamais reproché à mes professeurs de s’occuper de ceux qui en avaient besoin, bien au contraire. Mais je ne pourrait compter le nombre d’heures que j’ai passé à regarder les plafonds et/ou par les fenêtres (quand il y en avait!). J’ose espérer qu’avec les méthodes pédagogiques d’aujourd’hui, tous peuvent être inclus dans la dynamique de la classe. J’aurais pu donner tellement d’aide aux autres, me sentir utile, vaincre ma timidité naturelle et à tout le moins ne pas m’ennuyer durant des journées complètes… Professeurs, osez « utiliser » tous vos élèves!!

  • Il est vrai qu’en faisant du butinage dans la classe on arrive à trouver des réponses pertinentes. La plupart des élèves ont tendance à s’effacer devant ceux qui «ont toujours quelque chose à dire» et qui parfois n’ont pas nécessairement la bonne réponse.
    Questionner directement les élèves peut nous permettre justement de voir si les élèves ont compris la question, qui doit bien sûr être comprise de tous.

  • Merci de ce témoignage, Mélanie. Les élèves doués sont effectivement très mal mis à profit dans les classes. J’en connais plusieurs qui sont devenus ‘invisibles’ pour échapper aux brimades des caïds, dans une sorte de loi naturelle de la moyenne.

    Mathieu soulève un point important, à savoir le rôle de l’enseignant de faire en sorte que les choses soient comprises de tous. Non pas que cela soit toujours possible, mais on ne saurait l’esquiver dans le cas de ce qui est essentiel.

  • En lisant ce billet, je me suis souvenu d’avoir réagi à un autre de tes billets sur le même thème. J’ai trouvé le billet en question. Peut-être devrais-tu en faire un « ricochet ».

    Mélanie, je ne sais pas si la pratique en est répandue, mais, oui on utilise davantage les élèves ayant plus de facilité. Je crois que nous en sommes d’ailleurs à apprendre à ne pas abuser non plus. Je dis cela en parlant de l’expérience vécue par ma fille au primaire.

    Ayant de la facilité en classe, on l’a souvent utilisée pour aider des camarades ayant plus de difficultés. Notamment en la mettant en équipe avec l’un ou l’autre d’entre eux. Toutefois, j’ai pu constater, en discutant avec ma fille de son expérience, que dans certaines conditions, cela peut devenir un fardeau trop lourd à porter pour un jeune.

    D’abord, lorsque l’on a recours à cette stratégie systématiquement ou top fréquemment.

    Deux, associer un jeune à un camarade ayant des difficultés importantes de comportement peut également avoir le même effet.

    Mettre la facilité scolaire de certains élèves au service de ceux ayant plus de difficulté est une excellente piste, mais il faut être prudent. Quand ma fille m’a raconté son expérience, c’est que je lui demandais pourquoi chaque matin depuis deux semaines elle me disait ne pas avoir envie d’aller à l’école alors que cela n’arrivait jamais auparavant.

    C’est là que le chat est sorti du sac comme on dit.

  • Non, mais… quelle mémoire! Merci André.

    Je trouve particulièrement intéressante la mise en garde que tu fais par rapport à l’utilisation que l’on pourrait faire des élèves plus forts dans la classe. Ces élèves ont d’ailleurs rarement assez de front pour dire non au professeur qui demande leur aide. C’est une stratégie à utiliser avec prudence.



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