10 recommandations pour contrer le décrochage


OsterlohDroppingOutL’abandon fait le larron. (Marguerite de Navarre)

Le taux de non-diplomation au secondaire se maintient autour de 25 % au Québec (source : Institut de la statistique). Chez les garçons, c’est près d’un élève sur trois qui quitte le secondaire sans diplôme. En plus des conséquences ineffaçables pour les individus, ces échecs entraînent un coût social terrible avec des incidences sur le chômage, la santé et le crime. En attendant d’améliorer l’école, on peut certainement faire mieux pour mener à bon port les élèves pris dans la tourmente.

Aux États-Unis, où le décrochage frappe encore plus durement, on obtient des résultats encourageants en apportant un soutien individualisé dès la 3e secondaire, le moment crucial du taux de décrochage (Time : Stopping the Dropout Exodus). Au mois dernier, quelques organismes et entreprises ont organisé un sommet pour s’attaquer à ce qu’ils appellent The Silent Epidemic. Le sommet a donné lieu à une liste de dix recommandations pour combattre le décrochage :

    1. Soutenir la collecte de données précises sur la diplomation et le décrochage.

    2. Mettre en place des mesures pour détecter rapidement les élèves à risque.

    3. Procurer un conseiller adulte et des mesures de soutien scolaire.

    4. Encourager la participation des parents et des parcours individualisés de réussite.

    5. Établir un programme d’étude rigoureux en vue de terminer le secondaire et axé sur l’avenir (études postsecondaires, formation professionnelle).

    6. Offrir des voies d’étude parallèles pour les élèves en difficulté qui ont des besoins particuliers et des styles d’apprentissage différents.

    7. Hausser l’âge obligatoire de présence à l’école.

    8. Accroître les cours préparatoires à la formation professionnelle ou collégiale.

    9. Focaliser la recherche et disséminer les pratiques efficaces.

    10. Faire de la réussite scolaire et la formation au travail une priorité nationale.

Les élèves du Québec bénéficient déjà de quelques-unes de ces mesures. Par ailleurs, étendre à 18 ans l’âge minimum pour quitter l’école ne fera certainement pas l’unanimité, à l’instar de l’Angleterre (BBC : School leaving age set to be 18) où certains s’opposent vivement à une telle mesure (BBC : Enforced schooling to 18 opposed). Néanmoins, le Québec peut faire beaucoup plus pour soutenir les élèves en difficulté avant qu’ils n’arrivent au bord du précipice. Il vaut mieux prévenir que guérir.

L’on n’aurait pas à retenir les élèves à l’école si celle-ci les intéressait au départ. Il faut se rendre à l’évidence que l’école n’est plus de son temps. Il est insensé de croire que le quart des élèves qui fréquentent le secondaire ont des problèmes d’apprentissage. La mesure la plus efficace pour contrer le décrochage scolaire, c’est encore de faire en sorte que les élèves aiment l’école.

Mise à jour, 18 juin 2007 | Le blogue Écrans de veille en éducation apporte quelques chiffres sur la situation de la diplomation du secondaire en France, de même que l’étroite, mais désolante relation entre l’école et la perspective d’emploi.

Mise à jour, 20 juin 2007 | Mlle Vincent-Duschet, que je remercie cordialement, me signale un numéro spécial de la revue Ville-École-Intégration (mars 2003) qui comprend 5 articles sur la rupture scolaire dont j’ajoute les hyperliens :

Mise à jour, 22 juin 2007 | Christian me fait découvrir un bref article qui traite du faible taux de redoublement en Finlande (Le Point : Pourquoi les Finlandais réussissent sans redoubler). Considérant le succès du système finlandais, il y a de quoi réfléchir.

(Image thématique : Dropping out, par Ulrich Osterloh)


Par ricochet :

Une allocation pour contrer le décrochage

Décrochage scolaire à la hausse

Pourquoi y a-t-il moins de décrochage au Québec ?

Le e-learning pour contrer le décrochage scolaire

Une majeure dès le secondaire ?

Corrélation entre l’autodiscipline et la réussite scolaire

Compétences en lecture, décrochage et suicide

OIRS : Observatoire international de la réussite scolaire

L’argent en tant que motivation scolaire

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7 réponses

  • Éric Demers dit :

    T’as bien raison François, mais il faut tout de même nuancer un peu.

    Les faiblement motivés, si on se réfère à l’étude longitudinale de Potvin et Fortin, représentent 40 % des décrocheurs. Selon la typologie qu’ils ont développé sur les types de décrocheurs, il y a 4 groupes d’élèves à risque:
    * Le type «délinquance cachée»;
    * Le type«troubles du comportement et difficultés d’apprentissage»;
    * Le type «dépressif»;
    * Le type «peu intéressé».

    Et aussi surprenant que cela puisse paraître, il semble que ceux qui décrochent le plus, au prorata, sont les dépressifs.

  • Merci de la référence, Éric. Il n’y a pas à dire, c’est très bien nuancé :-)

    Je suppose les types de décrocheurs s’entrecroisent. Je me demande, par conséquent, jusque dans quelle mesure les trois autres types ne sont pas à l’origine du type « peu intéressé ».

  • Luc Papineau dit :

    À propos du décrochage et d’aimer l’école, je me permets, M. Guité de citer un passage du livre que j’ai co-écrit.

    «Un petit rappel historique peut d’ailleurs nous montrer à quel point l’histoire se répète. Ainsi, en 1943, on assiste à la mise en place de la Loi sur la fréquentation scolaire obligatoire. Seulement, celle-ci se heurte à certaines difficultés. Par exemple, les nouveaux programmes pédagogiques qui visaient à « tenir les élèves si intéressés au travail scolaire qu’ils ne veuillent pas manquer un seul jour de classe par leur faute » n’étaient malheureusement pas encore prêts. De plus, les principes pédagogiques retenus par ce renouveau pédagogique n’atteignaient pas les écoles à cause du « manque de ressources et de connaissances des maîtres ». Ce ne fut finalement qu’en 1947 que le nouveau programme fut officiellement mis en vigueur, mais on note un retard dans la publication des manuels reliés à cette nouvelle philosophie pédagogique. Enfin, plusieurs professeurs ne comprenaient pas encore l’utilité de « procéder lentement et sûrement, avec des quantités concrètes, dans des situations bien connues des enfants». (infos tirées de Aux origines de l’État-providence, Dominique Marshall, Les Presses de l’Université
    de Montréal, 1998, pages 92, 93, 94 et 100.)

    Je lis votre billet et j’ai une étrange impression de déjà-vu.

  • L’histoire ne dit pas si les écoliers étaient heureux de ce changement. Peu importe, puisque tôt ou tard la situation s’est à nouveau détériorée. Ce rappel historique, fort à propos, souligne bien la difficulté des programmes rigides à rejoindre les préférences des élèves.

  • Bonjour François,

    Et merci de ce billet intéressant.

    Je te signale plusieurs articles en ligne de la revue Ville-Ecole-Intégration (VEI) sur le sujet du décrochage ici : http://www.cndp.fr/lesScripts/bandeau/bandeau.asp?bas=http://www.cndp.fr/RevueVEI/selection.htm

    Allez au numéro 132 de mars 2003 pour lire :

    Quelques acquis d’un programme de recherche sur la déscolarisation
    Dominique Glasman

    La construction institutionnelle de la « déscolarisation »
    Bertrand Geay

    Décrochage scolaire.Genèse et logique des parcours
    Élisabeth Bautier

    « Résultats catastrophiques, un changement radical s’impose »
    Arrêts de scolarité : les paradoxes institutionnels
    Maryse Hédibel

    Élèves non affectés par l’école et ruptures scolaires. Enseignements d’une recherche sur un dispositif territorial
    Stéphane Bonnéry

    Bonne lecture !

  • Daniel Bigué dit :

    J’ajouterais une recommandation supplémentaire: comme j’ai souvent remarqué les carences en lecture chez les «décrocheurs-raccrocheurs» il est important de bien détecter les élèves qui éprouvent de la difficulté à faire le passage du apprendre à lire à lire pour apprendre. Ce passage se fait surtout en 4ème et 5ème du primaire. Le décrochage commence tôt… Également, à mon avis, je pense que «l’école administrative» est à repenser, le décrochage en est un épiphénomèmne. C’est la lave du volcan…

  • Mes remerciements à Mlle Vincent-Duschet pour les références dont j’ai ajouté les hyperliens ci-haut.

    Je rejoins Daniel dans tout ce qui touche au soutien pour prévenir le décrochage scolaire. La littératie est effectivement un indicateur de réussite, comme l’a démontré la recherche.

    J’apprenais tristement ce matin que ma commission scolaire, confrontée à un déficit budgétaire, a décidé de sabrer les mesures d’appui aux élèves en difficulté. Quand on a la responsabilité de prendre des décisions qui affectent des vies d’enfants, la gestion des budgets à court terme est une absurdité.



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