Les blogues scolaires pour l'éducation à la citoyenneté


WordsWisdomHoglund.jpgDans les rêves commence la responsabilité.
(William Butler Yeats)

Au constat que les générations internet adoptent des comportements inusités, Sandra Day O’Connor, juge retraitée de la Cour suprême des États-Unis, croit que les nouvelles technologies de la communication sont vitales dans l’éducation à la citoyenneté (eSchool News : Former High Court justice: Teach civics). Considérant que la citoyenneté est foncièrement une question de rapport culturel entre l’individu et l’environnement social, elle passe effectivement par la communication. Son éducation naît principalement de l’observation et de l’interaction verbale au sein de la famille et de la communauté. Apprentissage socioconstructiviste s’il en est un. Cependant, je crois que nous sous-estimons l’apport de l’écriture, notamment l’écriture en ligne, dans la cristallisation de la citoyenneté. Il s’agit d’un aspect négligé, mais bénéfique, de l’utilisation des nouvelles technologies en milieu scolaire.

Il y a dans l’écriture une expression de la pensée qui, parce qu’elle est cisaillée et sculptée, prend tout le poids de sa forme. L’empreinte sur l’identité n’en est que plus profonde. Depuis un peu plus de deux ans que je blogue, je constate que mon écriture, plus que tout autre facteur, a contribué à définir qui je suis, par opposition à qui l’on veut que je sois. Comme le disait François Hertel, « Écrire, n’est-ce pas se libérer toujours ? » Aussi contradictoire que cela puisse paraître, l’intervention inestimable de la communauté a poli les aspérités qui écorchaient plutôt que stimuler.

C’est précisément les écarts de conduite dans les blogues d’adolescents que les médias et les détracteurs se plaisent à souligner. Du coup, on banalise la majorité de ceux qui s’expriment correctement sur leur blogue, approfondissant leur pensée et renforçant leur sens civique. On ne tient pas compte, surtout, des apprentissages qui sont faits chez les jeunes pris en faute. Il y a des récidives, certes, mais la réprobation sociale a toujours contribué à l’éducation civique. L’un des avantages des blogues, c’est qu’ils permettent justement de voir où et quand intervenir.

L’intervention sera d’autant plus efficace avant l’adolescence, dès le primaire. Mario en a certainement long à dire sur le développement de la responsabilité civique chez les jeunes carnetiers de l’Institut St-Joseph. Ce n’est certainement pas par hasard que mes élèves qui en sont issus affichent une grande maturité à cet égard.

Dans l’affirmation de leur identité, les adolescents feront inévitablement des erreurs. Cependant, les blogues sont une vitrine fascinante à travers laquelle on peut leur faire signe. Je suis ravi de l’amélioration civique de mes élèves sur leurs blogues scolaires. Quoique j’aie dû intervenir vigoureusement au tout début pour corriger les écarts, je n’ai pratiquement plus à le faire. Je passe maintenant le plus clair de mon temps à encourager et complimenter les élèves. Et je me réjouis de voir les élèves se discipliner et s’encourager entre eux. N’est-ce pas cela l’esprit de la citoyenneté?

L’esprit civique n’a de sens que s’il est intrinsèque. La force n’entraîne qu’un simulacre de civisme. Par conséquent, il gagne à se développer lentement, comme un chêne. Chez un enfant, il se formera beaucoup plus sûrement sous l’oeil avisé des parents d’abord, puis de la communauté chez les jeunes. Si l’écriture contribue à forger sa pensée (ABC Science Online : Blogs help students think for themselves), le socioconstructivisme en renforce le sens.

Pour clore sur le débat électoral que vit le Québec, la véritable compétence citoyenne consiste à voir au-delà des discours politiques. Ou bien on se laisse guider par les promesses électorales, ou bien on intervient pour guider les politiciens ou pour agir sur la place publique.

(Image thématique : Words of Wisdom, par Robert Hoglund)


Par ricochet :

Les jeunes sont différents, naturellement

Échelle d’engagement social

L’école, lieu d’éducation ou d’Éducation

Les blogues scolaires et l’apprentissage

Les blogues stimulent la pensée


Quand intolérance rime avec incompétence (Remolino)

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2 réponses

  • L’éducation à la citoyenneté, c’est aussi – parallèlement à la prise de parole citoyenne – amener les jeunes à s’impliquer activement dans leur milieu scolaire et communautaire… Est-ce ce dont on parle ici?

  • Je ne suis pas étonné qu’une question si pertinente provienne de quelqu’un aussi engagé dans sa communauté. « L’éducation à la citoyenneté, c’est aussi – parallèlement à la prise de parole citoyenne – amener les jeunes à s’impliquer activement dans leur milieu scolaire et communautaire. » On ne saurait mieux dire.

    Pour répondre directement à la question, je ne fais pas directement allusion à l’action civique. Je regrette l’omission, et je te sais gré Jean d’avoir complété mon propos, lequel s’intéressait surtout à l’écriture. Quoique le développement de la conscience civique peut être vu comme un tremplin vers l’action communautaire, et c’est le plus souvent son aboutissement normal, tu as raison de croire qu’elle s’acquiert plus naturellement directement dans l’action.

    À défaut d’une implication directe, peu importe les raisons, la conscience civique demeure un objectif louable.



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