De l'agressivité des enfants québécois


Il y a un mois de cela, la déclaration du ministre de l’Éducation, Jean-Marc Fournier, qui évoquait la possibilité de revenir aux bulletins chiffrés ou lettrés, a beaucoup fait jaser. J’avais également abordé le sujet. Mais la nouvelle la plus importante, ce jour-là, n’était pas tant le caprice d’un ministre comme les résultats d’une étude à l’effet que les garderies contribueraient à rendre les enfants plus agressifs (La Presse : Le modèle québécois rendrait les petits agressifs et anxieux).

Le comportement général des élèves est devenu une préoccupation constante pour les enseignants. Voilà plusieurs années déjà que nous observons la dégénérescence du comportement chez les élèves, dont l’agressivité constitue une composante importante. Or, cette déliquescence coïncide avec la poussée des garderies. Celles-ci ne sont certes pas les seules responsables de cette augmentation de l’agressivité précoce (pensons aux médias, par exemple), mais tout porte à croire qu’elles y contribuent. On ne peut quand même pas prétendre que le fait d’arracher des enfants du giron familial pour les abandonner dans une mini-arène de lutte sociale n’a pas d’impact sur leur développement affectif.

Pas étonnant, dans ces conditions, que les enfants issus des garderies, en arrivant à l’école, soient peu enclins à moisir sur une chaise. On aura beau blâmer les garderies de corrompre les enfants, ce ne sera toujours qu’une manoeuvre de diversion. La véritable question est de savoir en quoi l’école québécoise s’est adaptée à ce nouveau type d’enfant qui a été initié très tôt à une forme d’apprentissage dynamique et interactive. Le problème ne viendrait-il pas plutôt d’une école désuète dont la structure d’encadrement et d’enseignement ne convient plus à sa clientèle ?

Je ne préconise surtout pas l’abandon de l’encadrement. Au contraire. Mais je crois qu’il est nécessaire de repenser nos méthodes d’encadrement (ou règles de vie, pour utiliser un euphémisme cher aux écoles) à la lumière des jeunes que nous devons former.

Mise à jour, 13 juillet 2007 | Le gouvernement anglais veut inclure dans le programme de formation des cours de civilité (BBC : Pupils to get lessons in respect). Un projet déjà en place au primaire produit des résultats significatifs, selon le gouvernement. Celui-ci croit d’ailleurs que cela aura un effet positif sur les résultats scolaires.


Par ricochet :

La dureté forme des enfants agressifs

La punition : cause de comportement asocial

Enseigner ou contrôler

La violence à l’école

Les enfants-rois (sans les manières souveraines)

La télévision n’affaiblit pas les résultats ; oui, mais…

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7 réponses

  • Yoann dit :

    Au risque de contourner le sujet, puis-je me permettre de me demander ce que cette violence deviendra à l’issue de la récente admission du kirpan dans les écoles?

  • Jean dit :

    «Le problème ne viendrait-il pas plutôt d’une école désuète dont la structure d’encadrement et d’enseignement ne convient plus à sa clientèle?»

    Cette question m’étonne… N’y a-t-il pas une ‘réforme’ en cours justement pour mieux répondre à cette ‘clientèle’?

  • La décision de la Cour suprême était prévisible en fonction de la Charte des droits et libertés qui garantit la liberté de religion. Cependant, les juges laissent la porte ouverte à certaines restrictions. C’est un jugement de Salomon. Personnellement, je ne crois pas que cette décision exacerbe le problème de la violence dans les écoles. Au contraire, l’occasion est belle de dénoncer l’agressivité, à partir du moment où on connaît le sens du kirpan.

    Pour répondre à la question de Jean, la réforme n’a pas été conçue en fonction du changement caractériel des enfants. Elle se veut d’abord et avant tout un changement fondamental sur le plan de la psychopédagogie, sans égard aux problèmes de comportement, et en fonction de principes considérés comme universaux. Là où il y a des incohérences, par contre, c’est au niveau de l’organisation des cours, les horaires, les règlements qui interdisent la circulation durant les heures de cours, la configuration physique des écoles, etc.

  • Clément Laberge dit :

    Merci François d’avoir attiré mon attention sur cette page:

    http://en.wikipedia.org/wiki/Kirpan

    Je m’étonne de n’avoir jamais entendu cette explication du sens du kirpan rapportée par « les grands médias ».

    À moins que ça m’ait simplement échappé…

  • Il y a eu une page complète dans le Journal de Montréal sur la signification religieuse du Kirpan. Mais, si ma mémoire est bonne, c’est dans La Presse, sous la plume de Rima Elkouri, que j’ai pris connaissance des conditions imposées par la cour: le Kirpan doit être dans une gaine en bois, enfermé dans un tissus rigide et cousu, porté en bandouillère sous les vêtements.

    Ce sont ces conditions qui constitueraient l’accommdement raisonnable.

  • Je viens de trouver cet article en ligne de Michel C. Auger sur l’accommodement raisonnable: http://www.canoe.com/infos/quebeccanada/archives/2006/03/20060304-080700.html

  • Étonnant comme cette nouvelle, qui a fait tant de boucan à sa parution, a si vite été reléguée aux oubliettes. Peut-être parce que plusieurs, une fois revenus de leur état de choc initial, ont fouillé un peu plus le sujet et se sont rendus à l’évidence du bien-fondé du jugement de la Cour suprême. Les reportages de journalistes à la tête plus froide, comme ceux rapportés par André, y ont certainement contribué.

    Pour ma part, le débat se résume fondamentalement à notre projet de société. Ou bien on valorise l’uniformité et la conformité, ou bien on mise sur la diversité. Le Canada, heureusement, mise sur le multiculturalisme. Dans une perspective de mondialisation, c’est une vision avant-gardiste. De toute façon, notre situation démographique et notre géographie ne nous laissent pas vraiment le choix.



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