La fin de l'autorité scolaire absolue


L’autorité repose en grande partie sur le pouvoir. À l’époque, pas si lointaine, où les enseignants et les institutions détenaient le savoir et le pouvoir, les élèves n’avaient qu’à bien se tenir. Or, les temps ont changé. Pour commencer, les médias ont largement contribué à diffuser le savoir. Aujourd’hui, les nouvelles technologies de la communication causent une nouvelle vague de changement qui habilitent les individus, au sens d’empowerment, comme aucune autre invention de l’histoire. Ce pouvoir tient largement au fait que les individus ont toute liberté de mailler des groupes à l’insu de l’ordre établi. La subversion a déjà atteint l’ordre universitaire, et elle ne devrait pas tarder à gagner le collégial et le secondaire.

Récemment, un article dans The Chronicle of Higher Education mettait en lumière les nombreuses façons dont les nouvelles technologies ont transformé les méthodes d’apprentissage des étudiants (The Net Generation Goes to College). Le plus étonnant, c’est que les universités sont impuissantes à endiguer la vague qui déferle ; elles n’ont d’autre choix que de s’adapter au changement.

Students these days are more apt to take control of their learning and choose unconventional, technological methods to learn better. [...] Soon [the professor] noticed more and more students gathered in groups at tables in the library, passing around information on their laptops, pulling information off the Internet, and learning together.


« In some cases, they weren’t going to class, » he says.

La conscience de leur autonomie incite les étudiants à organiser la vie universitaire comme ils l’entendent. Ils ne se contentent pas de modifier les méthodes d’apprentissage, mais de chambouler l’organisation des cours. À tel point que bon nombre de professeurs ont appris à ne plus donner de cours le vendredi (New York Times : How Thursday Became the New Friday). Naturellement, les administrateurs sont aux abois : « There are literally billions of dollars in facilities that sit empty for too many hours of the week. »

Au collégial et au secondaire, les premiers signes du bouleversement imminent sont déjà manifestes dans le mécontentement ou l’indifférence des élèves à l’endroit d’une école qui tarde à se moderniser. On reproche beaucoup aux élèves leur indiscipline, que les éducateurs, toujours les derniers à s’observer, sont prompts à mettre sur le compte de l’éclatement de l’ordre familial et social. Sans pour autant minimiser les bouleversements familiaux et sociaux, il n’en demeure pas moins que les écoles, avec leur organisation archaïque, sont largement responsables de leurs déboires. Je ne crois pas que l’on puisse continuer très longtemps à contrôler toute cette jeunesse par une autorité caduque, c’est-à-dire une autorité qui fait fi de leurs besoins éducationnels.


Par ricochet :

Transformer les écoles

L’éducation de l’I-génération

Le fossé des générations

Éduquer la génération Internet
Étude sur la génération M

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3 réponses

  • Sylvain Bérubé dit :

    L’enseignant doit devenir un catalyseur, et non un simple contrôleur (discipline de « chaises ») et/ou un déverseur de connaissances…

    À quand une structure organisationnelle qui favorise cette adaptation ?

  • R. Gauvin dit :

    Bonjour François,

    En lisant ton billet, je trouve que cela est un peu comme une révolution du bas vers le haut.

    Ainsi, les étudiants prennent en main leurs apprentissages selon leur besoins et selon la manière qu’ils veulent apprendre. Combien de fois, les enseignants se sentent en compétition avec les médias et la télévision ? « Bill Nye The Science Guy » a beaucoup plus de ressources pour expliquer ses concepts de sciences que la plupart des enseignants réunis ensembles.

    Cette révolution nous demandera qu’on se prépare et le plus tôt sera le mieux…

  • Sylvain a raison de dénoncer la disparité entre la structure organisationnelle et les nouvelles approches pédagogiques. Et ce n’est pas tout : l’architecture des écoles est mal adaptée aux nouvelles pratiques. Au Québec, je crains fort que ces deux handicaps ne coulent les nouveaux programmes de formation.

    Si je garde espoir dans l’avenir de l’éducation, c’est par conviction que le changement va forcément venir par le bas, comme le dit Roberto. À ce niveau, qui est celui de la première ligne d’attaque, je situe les élèves, de même que les enseignants et les directeurs engagés. Le changement viendra forcément tôt ou tard. Mais pour qu’il réussisse dans un avenir immédiat, il faudra un partenariat de tous les acteurs. Ce qui me ramène à la « structure organisationnelle » : à quand un véritable partenariat entre les élèves, les enseignants et la direction ? Si les enseignants sont la charnière de cette collaboration, les directeurs doivent en être les maîtres d’oeuvre. J’ai beaucoup d’estime pour les directeurs comme Roberto qui ont réussi ce tour de force. Sans doute parce que cette collaboration me manque.



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