Racines philo des théories d'apprentissage

La querelle entre les empiristes et les réformistes qui déchire le monde de l’éducation repose sur des approches philosophiques divergentes. Norm Friesen attire notre attention sur une représentation des influences philosophiques qui divisent le monde de l’éducation (Ipseity : Learning Theories: The Philosophical Family Tree). Le schéma, l’oeuvre de Gerry Stahl, nous ramène au rationalisme de Descartes pour aboutir enfin à la théorie de l’activité issue des travaux de Vygotski, en passant par Kant et Hegel. Mis à part les considérations particulières, ce portrait global illustre superbement les limites de l’empirisme.

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Nécessité d'enseigner l'éthique

L’éthique et la philosophie doivent faire contrepoids à l’envahissement des technologies. C’est une thèse que j’ai déjà avancée. Là où ça devient intéressant, c’est quand les nouvelles technologies, comme les blogues et les wikis, peuvent servir la cause du bien individuel et collectif. …

Marshall McLuhan, dans Understanding Media, a fait valoir que les technologies conduisent à une compression du temps — en tant que perception. Cette accélération du temps est d’autant plus évidente depuis que l’homme a réussi à dompter l’électricité :

Now in the electric age of decentralized power and information we begin to chafe under the uniformity of clock-time. In this age of space-time we seek multiplicity, rather than repeatability, or rhythms. This is the difference between marching soldiers and ballet.

Cette multiplicité dans l’action, cependant, conduit à la superficialité lorsque l’économie de temps ne sert qu’à l’agrégation des tâches, au détriment de l’approfondissement de la pensée. Par ailleurs, l’ubiquité des TICs confère à tout individu un pouvoir que la réflexion et l’éthique se doivent d’apprivoiser. Or, cette dernière est dangereusement absente du curriculum scolaire.

Une pensée trop pointue, quand elle est exacerbée par la technologie, peut être néfaste. À preuve ce billet d’Alex Halavais qui s’inquiète lui aussi de ce que l’armée cherche à équiper ses robots de fusils. Ce passage, surtout, illustre les lacunes de la moralité :

I recently had an interesting discussion with some graduate students from engineering and computer science, at a university with a lot of defense-funded research (not UB). They said something funny, that they didn’t think they would have to deal with ethical issues when they went into robots and AI (artificial intelligence) research.

L’enseignement de la morale a été un échec parce qu’on ne la jamais intégré aux autres disciplines scolaires, tout comme la qualité de la langue d’ailleurs. Ce à quoi, il me semble, les carnets électroniques et les wikis peuvent remédier. Car les carnetiers développent nécessairement une éthique à partir du socioconstructivisme collectif. Le nombre et l’étendue sont des différences fondamentales qui distinguent les communautés éducatives restreintes (un centre pénitencier, par exemple) des communautés globales (comme la blogosphère). Cela fait écho à la théorie du discernement collectif de James Surowiecki dans The Wisdom of Crowds. Ainsi, dans un contexte de carnet scolaire, il est fort à parier que l’intervention de la communauté aura raison de la superficialité de la pensée et développera le sens moral.

On pourrait aussi arguer que la lecture et l’écriture (au sens de littérature) cultivent l’éthique, mais ça c’est une autre histoire.


Par ricochet :
Les robots débordent des usines
La robotisation du cerveau