Qu'est-ce qui fait tant courir les profs ?


Pendant que j’accompagnais mon père à l’hôpital, et tandis que nous attendions longuement aux abords d’un poste d’accueil, celui-ci était fasciné par la célérité du personnel hospitalier. Le pas rapide avec lequel médecins, infirmiers et infirmières, techniciens et techniciennes filent dans les corridors a effectivement de quoi étonner quelqu’un de sa génération. Je lui faisais alors remarquer qu’on retrouvait le même comportement dans les écoles. Le phénomène, je crois, est symptomatique de l’appauvrissement des services sociaux. La pénurie de ressources matérielles et humaines oblige à redoubler d’effort.

Je le constate tous les jours d’école. Certains enseignants et directeurs filochent dans les corridors, entre les salles de cours, les bureaux, le secrétariat, la bibliothèque, la salle d’informatique, le photocopieur, et où sais-je encore. Certainement pas la salle de repos, où on ne s’attarde quelques minutes qu’au moment de la pause, lorsqu’elle est suivie d’une période hors de la classe. Une pause entre deux cours ? connais pas.

Et qu’est-ce qui occupe tant les enseignants ? D’autres, mieux que moi, ont énuméré la myriade de tâches qui grugent leur quotidien en dehors des heures de cours : la préparation des cours et du matériel, les rencontres avec les élèves, les communications, la correction, la paperasse administrative, et j’en passe. Mais par-dessus tout, il y a cette tonne de petites choses qui ne pèsent rien aux yeux de l’administration.

Bien entendu, ce n’est pas tout le personnel qui virevolte à l’emporte-pièce. Mais c’est généralement le lot de ceux qui sont détachés de leur bureau et d’un manuel. Et ils constituent une majorité. À dire vrai, je ne serais pas étonné qu’on puisse établir une quelconque corrélation (mais non un rapport certain) entre la célérité des professionnels et leur compétence.

Cette course folle ne serait pas grave si elle n’entraînait des conséquences néfastes pour l’éducation. Manifestement, la qualité du service en est affectée. Mais ce n’est pas tout ; les répercussions minent les enseignants. Parmi les contrecoups qui les affectent :

    - obligation d’aller au plus court, c’est-à-dire à l’essentiel ;

    - appauvrissement de la relation maître-élève ;

    - bâclage de la réforme ;

    - négligence des nouvelles technologies ;

    - sacrifice du travail collaboratif et de l’interdisciplinarité ;

    - délaissement de la recherche et de la formation continue ;

    - détérioration sur la santé physique et mentale ;

    - répercussions sur la vie de famille.

Faut-il s’étonner, dans ces conditions, qu’un enseignant sur trois risque un burn-out, que les dépressions soent plus fréquentes, que de plus en plus de jeunes profs décrochent de la profession. Pour plusieurs, le progrès s’effectue à revers.


Par ricochet :

Conditions de travail = plus d’apprentissage

Réactions sur la lourdeur de la tâche

Pourquoi les profs ne bloguent pas

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