L'illusion d'égalité


Dans ma quête d’individuation du travail des élèves, l’un des objectifs que je me fixe cette année est de convaincre ces derniers qu’ils ne sont pas égaux en tout. Car les élèves sont prompts à revendiquer les mêmes droits et privilèges au nom de l’égalité. Or, l’égalité existe de droit, mais non de fait. Il suffit de regarder un peu autour de nous pour constater les inégalités. Même dans la classe elles sautent aux yeux : différences de compétences, divergences de nature, discordances matérielles, et ainsi de suite. Si tout était égal, on baignerait dans l’uniformité. …

En tant qu’enseignant, je veux disposer de toute la marge de manoeuvre pour agir le plus efficacement possible auprès de chaque élève. Cela signifie des stratégies et des dispositions qui varieront en regard de chaque individu. Par conséquent, je ne veux pas avoir à limiter mes interventions en fonction d’une sacro-sainte égalité. Si, pour des raisons particulières, je donne une permission à un élève, je veux pouvoir la refuser à d’autres. Dans ce cas, il s’agit d’un privilège plutôt que d’un droit. Et les privilèges sont affaire de jugement, et non de principe. Je conçois que nous sommes tous égaux de droit — et il s’agit peut-être de la seule chose pour laquelle nous sommes égaux, car il s’agit d’une invention pour contrer les inégalités de la nature. Mais pour le reste, il existe trop de disparités pour agir sans discernement.

L’idéal d’égalité protège l’essentiel. Pour l’accessoire, nous avons l’équité. Bien entendu, ce sont des idéaux qui ne sont jamais tout à fait acquis et pour lesquels nous devons toujours lutter. De guerre lasse, plusieurs opteront pour les règles ou les méthodes toutes faites.

(Ces quelques réflexions font suite à l’excellent billet d’André Chartrand : Bernard Charlot, l’échec scolaire et le rapport au savoir.)

Mise à jour, 25 juillet 2005 | La fin du premier paragraphe a été modifiée en raison du commentaire judicieux de Marc André (voir ci-dessous).


Par ricochet :

Recherche cognitive et individuation

Synthèse de l’apprentissage individualisé

L’autonomie d’apprentissage

Types d’apprentissage

Types d’apprentissage II

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2 réponses

  • J’ai un petit problème avec ton premier paragraphe; tu dis ; « onstater les inégalités. Même dans la classe elles sautent aux yeux : différences de compétences, divergences de nature, discordances matérielles ». Il semble avoit confusion entre égalité et identité. Confusion qui se poursuit dans la dernière phrase : « Si tout était parfaitement égal, on baignerait dans une uniformité absolu ». Non, égale ne signifie pas identique, uniforme. Ça signifie, sur un même pied. Au même niveau par rapport à une norme.

    Ceci dit, je suis parfaitement d’accord avec le reste.

  • Merci, Marc André. J’avoue que la fin du premier paragraphe manquait de rigueur ; en effet, seule l’identité peut conférer une « uniformité absolue », comme je l’avais d’abord écrit. Je me suis empressé d’apporter les modifications qui s’imposent.

    Pour la partie qui précède, toutefois, je ne vois pas de problème. Je ne fais surtout pas allusion à une identité, mais bien à une égalité, dans le sens d’équilibre de force, de valeur semblable, ou « au même niveau » (comme tu l’entends). Je devine que c’était l’autre phrase qui en faussait le sens.



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